J’ai tendance à être d’accord à 100% mais j’ai peut-être une vision idéalisée de ma propre expérience ! Cela m’a également rappelé une autre citation de la même période (2011 vs 2010) de Steve Blank: « Ces dix dernières années, nous avons cru bâtir une méthodologie répétable (agile and customer development, [lean startup], business model design) au point de croire à une science, que quiconque pourrait appliquer. Je commence à entrevoir mon erreur. Ce n’est pas que la méthode soit fausse, mais tout le monde ne peut également en tirer le meilleur parti. De la même manière que le traitement de texte, excellent outil par ailleurs, n’a jamais fait l’écrivain, un processus d’innovation bien pensé ne garantira pas le succès. » Blank ajoute que « tant que l’on ne saura pas vraiment comment enseigner la créativité, le succès sera toujours limité. Tout le monde n’est pas artiste, après tout. » L’intégralité de l’entretien se trouve sur archive.org.
et aussi Komisar: « Je pense qu’il y a des choses que vous ne pouvez pas apprendre à l’école et je ne suis même pas sûr que vous puissiez apprendre cela sur le tas. Il y a un caractère entrepreneurial. Certaines personnes l’ont et d’autres pas. Certaines personnes peuvent ne pas penser qu’elles ne l’ont pas, et elles peuvent l’avoir. Beaucoup de gens pensent l’avoir, et ne l’ont pas. »
Le « Mom Test » est un livre bienvenu pour tout élève de Steve Blank et de son modèle du « Customer Development » : valider des hypothèses pour lancer sa startup en explorant l’existence de clients et d’un marché, certes. Mais comment concrètement aborder cette phase délicate quand on n’est pas un spécialiste ?
L’auteur Rob Fitzpatrick dit avoir fait face de multiples fois à cette situation et donne d’excellents conseils notamment sur la manière de mener les premiers entretiens et d’en tirer des informations pertinentes. C’est, je crois, la qualité principale et assez rare finalement de ce livre. A lire absolument quand on se sent démuni sur le sujet et plus encore si on ne croit pas avoir besoin de conseils !
C’est un petit livre de 122 pages dont je conseille vraiment la lecture. En voici quelques extraits (de la version anglaise, rapidement traduite) en espérant vous convaincre :
Chaque question que nous posons comporte la possibilité très réelle de biaiser la personne à qui nous parlons et de rendre tout l’exercice inutile (page 3)
Et j’ajoute une affirmation forte de Steve Blank : Parler aux clients est difficile.
La mesure de l’utilité d’une première conversation client est de savoir si elle nous donne des faits concrets sur la vie et la vision du monde de nos clients. (Page 12)
Le Mom Test : 1. Parlez de leur vie plutôt que de votre idée
2. Renseignez-vous sur des spécificités du passé plutôt que sur des génériques ou des opinions sur l’avenir
3. Parlez moins et écoutez plus (Page 13)
Blank parle d’une journée dans la vie de votre client. Vous devez comprendre les actions et les interactions, qui fait, qui décide, qui paie.
Voici une liste selon l’auteur de bonnes et mauvaises questions : « Pensez-vous que c’est une bonne idée ? »
« Achèteriez-vous un produit qui a fait X ? »
« Combien paieriez-vous pour X ? »
« Que ferait le produit de vos rêves ? »
« Pourquoi vous dérangez-vous ? »
« Quelles sont les implications de cela ? »
« Parlez-moi de la dernière fois que cela s’est produit. »
« Parlez-moi de votre flux de travail. »
« Qu’avez-vous essayé d’autre ? »
« Payeriez-vous X pour un produit qui a fait Y ? »
« Comment gérez-vous cela maintenant ? »
« D’où vient l’argent ? »
« À qui d’autre devrais-je parler ? »
« Y a-t-il autre chose que j’aurais dû demander ? »
à la page 15 et l’auteur vous laisse réfléchir à leur pertinence avant de donner son point de vue dans la suite.
Ce que vous devriez avoir à l’esprit est donné à la page 22 : « Ils possèdent le problème, vous possédez la solution. » Et c’est tellement vrai, comme l’ont mentionné Henry Ford ou Steve Jobs, que les clients ne savent pas ce qu’ils veulent !
Donc (page 49), lors de l’interview, « Commencez large et ne zoomez pas avant d’avoir trouvé un signal, à la fois avec l’ensemble de votre entreprise et à chaque conversation. »
Comment commencer ?
Dans son livre sur le développement de la clientèle, Les 4 étapes vers l’ épiphanie, Steve Blank résout ce problème en recommandant 3 réunions distinctes :
la première sur le client et son problème ;
la seconde sur votre solution ;
et la troisième pour vendre un produit.
En séparant les réunions, vous évitez le zoom prématuré et les biais de vos idées. Dans la pratique, cependant, je trouve à la fois difficile et inefficace de les mettre en place. Le coût en temps d’une réunion d’une heure est de plus de 4 heures une fois que vous avez pris en compte la danse du calendrier, les déplacements et la révision.
Si la solution n’est pas une série de 3 réunions, qu’est-ce que c’est ? Vous avez peut-être remarqué une tendance dans les exemples de conversation que nous avons vus jusqu’à présent : rester décontracté. (Page 56)
Règle de base : apprendre à propos d’un client et de ses problèmes fonctionne mieux lors d’une discussion rapide et informelle qu’une longue réunion formelle.
Avancer
Ensuite, vous devez délivrer (page 62): « Lorsque vous ne parvenez pas à avancer, vous vous retrouvez avec des prospects zombies: des clients potentiels (ou des investisseurs) qui continuent à dire des choses positives, mais qui ne semblent jamais signer un chèque. »
Règle de base : des « clients » qui restent sympathiques mais qui ne vont jamais acheter sont une source particulièrement dangereuse de signaux mixtes.
Idéalement, vous devriez trouver un champion en tant que premier client. Page 73: « Steve Blank les appelle les earlyvangelists (les premiers évangélistes). Dans le monde des logiciels d’entreprise, ce sont les personnes qui :
• Ont un problème
• Savent qu’elles ont un problème
• Ont le budget pour résoudre le problème
• Ont déjà concocté leur propre solution de fortune »
Bien sûr, pour poser des questions, vous devez organiser des conversations. C’est le sujet du chapitre 6…
Un court extrait : « Le format cadre que j’aime comporte 5 éléments clés.
1. Vous êtes un entrepreneur essayant de résoudre l’horrible problème X, expliquant votre merveilleuse vision Y, ou de corriger l’industrie stagnante Z. Ne parlez pas de votre idée.
2. Définissez les attentes en mentionnant à quel stade vous en êtes et, si c’est vrai, que vous n’avez rien à vendre.
3. Montrez vos faiblesses et donnez-leur une chance d’aider en mentionnant votre problème spécifique pour lequel vous cherchez des réponses. Cela permettra de clarifier que vous n’êtes pas une perte de temps.
4. Mettez-les sur un piédestal en montrant à quel point ils peuvent, en particulier, aider.
5. Demandez de l’aide. »
Règle de base : continuez à avoir des conversations jusqu’à ce que vous n’appreniez plus de choses nouvelles.
Ensuite, vous devrez vous concentrer en effectuant une segmentation et un découpage des clients. Ceci est le chapitre 7.
Règle de base : les bons segments de clientèle sont une paire qui-où. Si vous ne savez pas où trouver vos clients, continuez à découper votre segment en plus petits morceaux jusqu’à ce que vous le fassiez.
Le process
Évitez de créer (ou d’être) le goulot d’étranglement. Pour ce faire, le client et l’apprentissage doivent être partagés avec toute l’équipe fondatrice, rapidement et fidèlement.
Cela repose sur de bonnes notes et un peu de travail avant et après la réunion. Tous les membres de l’équipe qui prennent des décisions importantes (y compris des décisions techniques) doivent assister à au moins certaines des réunions.
Les techniciens n’ont pas besoin d’aller à toutes les réunions, mais vous en apprendrez tous énormément en écoutant de temps à autre les réactions des clients. Vous pourrez également vous entraider à détecter et à corriger vos erreurs et préjugés de conversation. (Page 99)
Le nombre de participants côté startup ? 2 est idéal, 1 ne suffit pas pour prendre des notes et éviter les biais, plus c’est compliqué.
Conclusion
Je pose toujours des questions stupides tout le temps. Vous aussi. Ne vous en faites pas. En fait, hier encore, j’ai foiré une réunion particulièrement importante en passant en mode pitch (c’était hier au moment de [ma] rédaction… j’espère plus au moment de [votre] lecture). (Page 112)
avec une belle citation finale: « Avoir un processus est précieux, mais ne restez pas coincé. Parfois, vous pouvez simplement décrocher le téléphone et défaire le nœud. » (Page 113)
PS: je trouve en définitive ce livre plus intéressant que Lean Startup de Eric Ries et voici la raison de mon scepticisme.
PS2: merci à Laurent et Monica pour m’avoir conseillé la lecture de ce petit bijou !
J’ai utilisé à nouveau aujourd’hui la merveilleuse définition de Steve Blank d’une startup que j’avais utilisée pour la dernière fois en 2013 ici.
Vous pouvez l’écouter la donner à Helsinki en 2011 à l’université Aalto
ou grâce à son Mooc ici:
C’est évident une fois que vous l’avez entendu mais cela a pris des années à être conçu!
Dans ces temps incertains de Coronavirus, je ne peux que vous encourager à la relaxation. Une manière pour moi l’a été à travers Recomposed by Max Richter – Vivaldi’s Four Seasons.
Entreprise Romande m’a demandé un article, et voici ce que j’ai proposé. Il a été publié le 2 mars 2012.
Deux citations célèbres méritent d’être rappelées : en 1899, Charles Duel proposa de fermer l’office des brevets qu’il dirigeait aux Etats Unis en indiquant que « tout ce qui est à inventer l’a déjà été ». Moins d’un siècle plus tard, Bill Gates indiquait avec conviction qu’ « un ordinateur n’avait pas besoin de plus l’équivalent qu’une disquette de mémoire. » Si ces deux prédictions montrent qu’une des difficultés de l’innovation est l’impossibilité qu’il y a à se projeter trop en avant, elles ne sont malheureusement que des légendes ! Il n’en reste pas moins vrai que les innovateurs doivent faire face à de multiples obstacles, le premier d’entre eux étant l’incertitude permanente dans laquelle se trouve celui qui veut proposer de la nouveauté.
Les difficultés ne s’arrêtent pas à la porte du futur. Dans un célèbre ouvrage, le professeur Clayton Christensen explique le dilemme des grandes entreprises face à l’innovation. Christensen emploie le mot Great et non pas Large, car il parle des mieux gérées : en étant à l’écoute de leurs clients, elles cherchent en permanence à mieux les servir en améliorant par des évolutions constantes la qualité de leurs produits et de leurs services. Ce faisant, il leur est extrêmement difficile de voir venir des révolutions, d’autant plus difficiles à identifier qu’elles commencent souvent très humblement, avec des produits de piètre qualité et très incomplets. Christensen cite de nombreux exemples, mais notons simplement que Microsoft faillit manquer le tournant d’un web qui ne générait pas de revenus, Nokia est passé à côté du marché des Smart Phones et j’ajoute cette célèbre citation de Henry Ford : « Si j’avais demandé aux consommateurs ce qu’ils voulaient, ils m’auraient répondu ‘un cheval plus rapide’».
Tout acteur intelligent apprend vite de ces erreurs. Christensen, devenu une référence, explique que les grands acteurs doivent tout simplement créer des spin-off loin des clients et centres de développement. Malgré des errements initiaux, Nespresso est devenu un produit phare de Nestlé. Peut-être sait-on moins que Cisco est devenu un acteur dans le monde des serveurs en ayant intégré une start-up qu’elle avait financée à ses débuts. Les leçons de Christensen ont été digérées et aujourd’hui d’autres experts sont devenus les papes de l’innovation avec des modèles plus affinés
La spin-off est une évidence, et bonne nouvelle, point n’est besoin de ressources considérables, du moins au début. On prône aujourd’hui des itérations rapides en contact permanent avec les clients potentiels dès le lancement d’un projet. Il a aussi été compris qu’il faut d’abord trouver des clients visionnaires prêts à tester des produits incomplets mais prometteurs. Des corrections pourront être apportées en permanence et éviteront des investissements inutiles dans des directions que le marché refuserait plus tard. Enfin, le passage des clients visionnaires aux clients plus conservateurs demandera une stratégie spécifique et souvent une nouvelle équipe pour le développement du produit. Procédés systématiques qui garantiraient le succès des futures innovations ? Malheureusement non. Dans un récent entretien à la presse finlandaise, Steve Blank qui avait cru développer une théorie scientifique de l’innovation déclara : « ces dix dernières années, nous avons cru bâtir une méthodologie répétable au point de croire à une science, que quiconque pourrait appliquer. Je commence à entrevoir mon erreur. Ce n’est pas que la méthode soit fausse, mais tout le monde ne peut également en tirer le meilleur parti. » De la même manière que le traitement de texte, excellent outil par ailleurs, n’a jamais fait l’écrivain, un processus d’innovation bien pensé ne garantira pas le succès. Blank ajoute que « tant que l’on ne saura pas vraiment comment enseigner la créativité, le succès sera toujours limité. Tout le monde n’est pas artiste, après tout. »
Je vais expliquer avec plus de détails sa théorie mais la raison principale pour laquelle j’aime ce livre est qu’il explique pourquoi les fondateurs sont essentiels aux premières phases de développement d’une start-up. Ce n’est pas le discours habituel de « mettre en place les compétences commerciales et cacher les fondateurs » mais plutôt d’ « apprendre et devenir des experts jusqu’au point d’atteindre vos limites ». Je dois tout de suite ajouter que ce n’est pas un livre facile à lire et qu’il est surtout utile à ceux qui se lancent dans l’aventure entrepreneuriale mais aussi dans le développement de produits. Son site web steveblank.com est bourré d’informations, vous trouverez des tonnes de documents sur ses enseignements sur internet et je recommande en particulier sa liste de conseils de lecture Books for Startups.
Steve Blank est célèbre dans le monde entier (mea culpa pour n’avoir pas écrit tout cela plus tôt) pour sa théorie du « Customer Developement ». Alors que nous savons tous que le monde de la high-tech ne parle pas de technologie (non!, les idées et la technologie ne suffisent pas à décrire ce monde), nous avons par contre tendance à penser produits (ce qui est bien plus que la technologie) ou marchés (le business face à la technologie). Mais Steve Blank explique très bien que les produits peuvent être une illusion (ne jamais se vendre) et les marchés extrêmement dangereux si mal compris alors que ce qui compte ce sont les utilisateurs des produits, les personnes qui font les marchés, à savoir les clients. Il explique l’importance d’interagir et avec des clients potentiels avant même la conception et la réalisation des produits (« bottom-up ») puis d’itérer avec eux pendant les développements et d’être attentif à ne pas analyser les marchés que de manière macro-économique ou « top-down ».
Un de ses messages les plus connus dit que le « Product Development » isolé peut être mortel et doit être fait en parallèle avec le « Customer Developement » only. Les start-up n’ont pas au début besoin d’équipe de marketing, de ventes ou de « Business Development », mais de deux équipes seulement, en « Product Development » et en « Customer Development », chacune dirigée par un des fondateur(s)/CEO. Voici une description plus détaillée de ce processus (qui se trouve aussi sur internet) . Puis, quand elles deviennent de grandes entreprises, les start-up peuvent se tourner vers les modèles traditionnels d’organisation.
Voici un ouvrage à lire absolument si vous êtes en mode start-up. Cela vous évitera quelques erreurs (dont certaines peuvent être mortelles).
Steve Blank est connu dans la Silicon Valley comme entrepreneur et enseignant en entrepreneuriat. En particulier, il a proposé sa vision de la région – a Secret History of Silicon Valley – qui montre l’importance des militaures et de la guerre froide dans sa construction.
Il affirme que les barrières que rencontre l’entrepreneur diminuent. Les voici:
1. de longs cycles de développement de la technologie (combien de temps de l’idée au produit),
2. le coût élevé de vendre à des premiers clients (combien de dollars pour construire le produit),
3. la structure de l’industrie du capital-risque (un nombre limité de sociétés de capital-risque chacun ayant besoin d’investir des millions pour le démarrage),
4. l’expertise sur la façon de construire des start-up (regroupés dans des régions spécifiques comme la Silicon Valley, Boston, New York, etc),
5. le taux d’échec des nouvelles entreprises (les start-up avait pas de règles formelles et le succès devenait très binaire),
6. le taux d’adoption lent des nouvelles technologies par le secteur public et les grandes entreprises.
Et il pense que nous entrons dans une nouvelle ère qu’il appelle « La démocratisation de l’entrepreneuriat ». Ainsi il voit:
– La compression du cycle de développement produit
– Des start-up construites pour des milliers plutôt que des millions de dollars
– La nouvelle structure de l’industrie du capital de risque
– L’entrepreneuriat comme domaine scientifique propre
– L’Internet et le consommateur individuel moteurs de l’Innovation
J’ai réagi directement sur son blog en écrivant ce qui suit. « Je dois admettre que je suis intrigué. Laissez-moi développer ma pensée. Sur le positif, l’optimisme exprimé dans cet article fait du bien et l’on se sent mieux après sa lecture. J’ai tendance à penser que des barrières à l’entrepreneuriat ont diminué. Mais j’ai sans doute gardé trop longtemps mais lunettes de soleil et je ne vois pas les étoiles. (mais je pense que l’article est excellent et doit être mentionné par chacun à son petit réseau de relations). Mais sur le négatif, je crains que ces mêmes barrières n’existent encore dans les domaines de la biotechnologie, du semiconducteur (et de la plupart des domaines matériels incluent des innovations radicales) ou même dans ces domaines de cleantech/greentech (qui par ailleurs sont peut-être plus des bulles spéculatives que de véritables innovations). Dans ces domaines, les cycles de développement restent longs, les investisseurs précautionneux en raison des besoins en capitaux; Richard Newton, le professeur de Berkeley (http://www.eecs.berkeley.edu/~newton/presentations), avait noté il y a longtemps déjà , que la plupart des talents quittaient ces domaines difficiles pour des contrées plus aisées ou plus prometteuses en s’inquiétant que nous ne prenions plus assez de risques (il s’agissait alors de la fuite vers l’Internet des entrepreneurs/chercheurs de l’IT et du HW). Il se peut tour à fait que nous n’innovions plus que que nous ayoons plus à innover dans ces domaines classiques auquel cas Blank a raison. Mais si au contraire nous sommes aveuglés par les supernovas, nous allons au plus facile ce qui brille le plus et nous ne voyons pas la myriade d’autres opportunités moins visibles et pourtant importantes…
Voici ma traduction intégrale de son article:
Au plus profond de la nuit, les hommes voient les étoiles
Au plus profond de la nuit, les hommes voient les étoiles
Ralph Waldo Emerson
A l’occasion de Thanksgiving, il pourrait sembler qu’il ya beaucoup moins de raisons d’être reconnaissants. Un Américain sur dix n’a pas de travail. La sagesse populaire dit que nous allons finir par nous mordre les doigts d’une série de décisions économiques désastreuses, comme la délocalisation de la production de biens hors d’Amérique. Les États-Unis sont maintenant un pays débiteur de la Chine et il va falloir rembourser la dette. Les experts disent que le rêve américain est mort et que cette prochaine décennie verra la poursuite du déclin et la chute de l’Occident et en particulier des États-Unis.
Il se peut que tous les prophètes de malheur aient raison.
Mais je ne le crois pas.
Permettez-moi de vous donner ma prédiction. Il y a une chance que la sagesse commune soit très, très fausse et que la deuxième décennie du 21ème siècle puisse se révéler en Occident et en particulier aux États-Unis comme son heure de gloire.
Je crois que nous regarderons cette décennie comme le début d’une révolution économique aussi importante que la révolution scientifique du 16ème siècle et la révolution industrielle au 18ème siècle. Nous sommes au début de la révolution entrepreneuriale. Cela ne signifie pas juste plus de technologie, même si c’en est un élément. C’est une révolution qui va remodeler les affaires telles que nous les connaissons et, plus important, changer la qualité de la vie sur la planète entière pour tous ceux qui viendront après nous.
Il se passe quelque chose ici, mais ce que c’est n’est pas très clair.
L’histoire est connue. Au cours des cinquante dernières années, la Silicon Valley est devenue la cœur de la technologie de pointe et le pôle d’innovation pour les États-Unis et le monde. La Silicon Valley nous a amusé, relié (et séparé) comme jamais auparavant, elle a rendu des entreprises plus efficace et conduit à la transformation complète de l’ensemble de l’industrie (librairies, location de vidéos, journaux, etc)
Vague après vague de matériels, logiciels, biotechnologie et produits des technologies propres ont émergé de ce qui est devenu le « Ground Zero » de la culture entrepreneuriale. La Silicon Valley a émergé d’intersections fortuites:
• la recherche financée par guerre froide en physique et en électronique à l’Université Stanford,
• un doyen de Stanford Engineering qui a encouragé la culture de l’innovation plutôt que la recherche purement académique,
• la guerre froide et le financement par les militaires conduisant à des produits pour l’industrie de défense dans les années 1950,
• un seul chercheur aux Bell Labs qui décide de lancer son entreprise de semi-conducteurs à côté de Stanford dans les années 1950 qui a conduit à
• la vague de start-up de semi-conducteurs dans les années 1960 / 70’s,
• l’émergence du capital-risque comme industrie,
• la révolution l’informatique personnelle dans les années 1980,
• l’essor de l’Internet dans les années 1990 et, enfin,
• la vague d’applications de commerce internet dans la première décennie du 21e siècle.
Le motif récurrent de la Vallée semblait être clair. Chaque nouvelle vague d’innovation a été comme un équilibre ponctué – juste au moment où vous pensiez que la vague avait fait son temps, un changement soudain et radical changement dans une nouvelle technologie émergeait.
Les obstacles à entrepreneuriat
Bien que les start-up aient continué d’innover à chaque nouvelle vague de technologies, le taux d’innovation a été entravé par des que limitations maintenant seulement nous pouvons comprendre. Ce n’est que dans les dernières années que nous apprécions que les start-up dans le passé ont été entravés par:
1. de longs cycles de développement de la technologie (combien de temps de l’idée au produit),
2. le coût élevé de vendre à des premiers clients (combien de dollars pour construire le produit),
3. la structure de l’industrie du capital-risque (un nombre limité de sociétés de capital-risque chacun ayant besoin d’investir des millions pour le démarrage),
4. l’expertise sur la façon de construire des start-up (regroupés dans des régions spécifiques comme la Silicon Valley, Boston, New York, etc),
5. le taux d’échec des nouvelles entreprises (les start-up avait pas de règles formelles et le succès devenait très binaire),
6. le taux d’adoption lent des nouvelles technologies par le secteur public et les grandes entreprises.
La démocratisation de l’entrepreneuriat
Ce qui se passe est quelque chose de plus profond qu’un changement dans la technologie. Ce qui se passe, c’est que toutes les choses qui ont été des barrières pour les startups et l’innovation disparaissent. Toutes à la fois. À partir de maintenant.
La compression du cycle de développement produit
Dans le passé, le temps pour construire un premier produit se mesurait en mois voire en années pour répondre à la vision du fondateur ou aux besoins des clients. Cela signifiait la construction de toutes les fonctions dans un produit monolithique. Pourtant, une fois le produit livré, les start-up concluaient que les clients n’avaient pas utilisé la plupart de ces caractéristiques. Les fondateurs avaient tout simplement tort sur leurs hypothèses ou sur les besoins des clients. L’effort qui avait été fait pour toutes ces fonctionnalités avait été gaspillé.
Aujourd’hui les start-up ont commencé à construire des produits différemment. Au lieu d’inclure le nombre maximum de fonctionnalités, elles cherchent à fournir une fonctionnalité minimale dans les plus brefs délais. Cela leur permet de livrer une première version du produit à des clients en une fraction du temps.
Car les produits sont simplement des « briques » livrées sur le web, un premier produit peut être livré en quelques semaines plutôt qu’en quelques années.
Des start-up construites pour des milliers plutôt que des millions de dollars
les start-up exigeaient traditionnellement des millions de dollars de financement juste pour obtenir leur premier produit. Une société de développement de logiciels devait acheter des ordinateurs et des logiciels à d’autres entreprises et embaucher du personnel pour exécuter et maintenir. Une start-up de matériel devait construire des prototypes et investir dans l’équipement d’une usine pour fabriquer le produit.
Aujourd’hui l’open source a réduit le coût de développement de logiciel de millions de dollars à des milliers. Pour le matériel, on ne doit plus construire sa propre usine et les coûts sont absorbés par les fabricants offshore.
Le coût pour obtenir le premier produit de commerce sur Internet a chuté d’un facteur dix ou plus dans la dernière décennie.
La nouvelle structure de l’industrie du capital de risque
Le coût en chute libre d’un premier produit sur le marché (en particulier pour les start-up Internet) a secoué l’industrie du capital-risque. Le capital- risque était un club fermé et regroupé dans la Silicon Valley, à Boston et New York. Bien que ces entreprises soient toujours là (et grandissent), la quantité d’argent qui investit du capital risque dans les jeunes entreprises a augmenté, et une nouvelle classe d’investisseurs a émergé. De nouveaux groupes de capital-risque, des Super Angels, plus petits que les fonds traditionnels (tailles de plusieurs centaines millions de dollars), peuvent faire de petits investissements nécessaires pour lancer une start-up Internet. Ces anges font beaucoup de paris au début, puis réinvestissent quand les premiers résultats apparaissent. (Et les résultats viennent beaucoup plus vite que dans une start-up traditionnelle.)
En plus de « super anges », les incubateurs comme Y Combinator, TechStars et plus de 100 autres à travers le monde, ont commencé à formaliser le modèle. Ils paient des frais de la start-up pendant 3 mois, jusqu’à ce que les résultats permettent de lever des fonds à plus grande échelle.
Enfin, le capital-risque et l’investissement des anges n’est plus un phénomène américain ou euro-centrique. Le capital-risque a émergé en Chine, l’Inde et d’autres pays où la prise de risque, l’innovation et la liquidité est encouragée, à une échelle jusqu’alors connue seulement aux États-Unis
L’émergence d’incubateurs et des super anges a considérablement élargi les sources du capital d’amorçage. La mondialisation de l’esprit d’entreprise signifie que le potentiel de start-up a augmenté d’au moins dix fois depuis le début de ce siècle.
L’entrepreneuriat comme domaine scientifique propre
Au cours des dix dernières années, les entrepreneurs ont commencé à comprendre que les start-up ne sont pas simplement des versions plus petites des grandes entreprises. Alors que les entreprises exécutent des modèles d’affaires, les start-up cherchent des modèle d’affaires. (Ou plus précisément, les start-up sont des organisations temporaires destinées à la recherche de modèles d’entreprises multipliables et reproductibles.)
Au lieu d’adopter les techniques de gestion des grandes entreprises, qui, trop souvent, étouffent l’innovation dans une jeune start-up, les entrepreneurs ont commencé à développer leurs propres outils de gestion. En utilisant une liste de solutions pour le modèle d’affaires / les développement clients / le développement agile, les entrepreneurs tout d’abord bâtissent des hypothèses (leur modèle d’affaires), ensuite vérifient ces hypothèses avec les clients en dehors de leur domaine (développement de la clientèle) et utilisent une méthodologie de développement itératif et incrémental (développement agile) pour créer le produit. Lorsque les fondateurs découvrent que leurs hypothèses sont fausses, ce qui arrive inévitablement, il n’y a pas nécessairement crise, mais activité d’apprentissage appelée un pivot – et une occasion de changer le modèle d’affaires.
Le résultat : les start-up ont maintenant les outils qui accélèrent la recherche de clients, réduisent les délais de commercialisation et coupent les coûts de développement.
L’Internet et le consommateur individuel moteurs de l’Innovation
Dans les années 1950 et 60, la Défense et les organisations de renseignement américain furent les moteurs de l’innovation dans la Silicon Valley en fournissant des fonds pour la recherche et le développement dans les universités, et en achetant des systèmes d’armes utilisant les premières technologies micro-ondes et les composants semi-conducteurs. Dans les années 1970, 80 et 90, le relais fut pris par les grandes entreprises avec l’innovation dans les PC, les matériels de communication et les logiciels d’entreprise. Secteurs publics et entreprises sont maintenant des suiveurs plutôt que des leaders. Aujourd’hui, ce sont les consommateurs – en particulier les entreprises Internet grand public – qui sont les moteurs de l’innovation. Lorsque le produit et le canal sont des bits informatiques, l’adoption par 10 ou 100 millions d’utilisateurs peut se produire en quelques années et non plus en décennies.
La singularité entrepreneuriale
Les obstacles à l’entrepreneuriat ne sont pas simplement supprimés. Dans chaque cas, ils sont remplacés par des innovations qui accélèrent chaque étape, parfois par un facteur dix. Par exemple, pour le commerce Internet, le temps nécessaire pour obtenir le premier produit sur le marché a été divisé par dix, les dollars nécessaires pour obtenir le premier produit sur le marché également, le nombre de sources de capital initial pour les entrepreneurs a été multiplié par dix, etc.
Et tandis que l’innovation se déplace à la vitesse d’Internet, cela ne sera pas limité aux start-up internet. Elle se propage à l’entreprise et, finalement, à tous les segments d’affaires.
Au plus profond de la nuit, les hommes voient les étoiles
Le ralentissement économique aux États-Unis a eu une conséquence inattendue pour les start-up – il a en créé plus. Jeunes ou vieux, des innovateurs qui sont sans emploi ou sous-employés font maintenant face à moins de risques pour le démarrage d’une entreprise. Ils ont beaucoup moins à perdre et beaucoup plus à gagner.
Si nous sommes à la veille d’une révolution aussi importante que les révolutions scientifique et industrielle, qu’est-ce que cela signifie? Les révolutions ne sont pas évidentes quand elles se produisent. Lorsque James Watt a commencé la révolution industrielle avec la machine à vapeur en 1775, personne ne dit: «Ceci est le jour où tout change. » Lorsque Karl Benz a conduit son véhicule autour de Mannheim en 1885, personne ne dit: « Il y aura 500 millions de ces véhicules dans d’un siècle. » Et certainement en 1958, lorsque Noyce et Kilby inventèrent le circuit intégré, l’idée d’un quintillion (10 à la puissance 18) de transistors produits chaque année semblait ridicule.
Pourtant, il est possible que nous regardions un jour cette décennie comme le début de notre propre révolution. On se rappellera de ce temps où les découvertes scientifiques et les avancées technologiques auront été intégrées dans le tissu de la société plus vite qu’ils ne l’avaient jamais étés. Que la vitesse d’opération des entreprises exploitées aura changé pour toujours. Comme le moment où nous avons réinventé l’économie américaine et que notre produit intérieur brut a commencé à décoller ; que les États-Unis et le monde ont atteint un niveau de richesse jamais vu avant. Il peut être l’aube d’une nouvelle ère pour une nouvelle économie américaine basée sur l’entrepreneuriat et l’innovation.
Une période que nos enfants regarderont en arrière et s’émerveilleront que au plus profond de la nuit, nous avons vu les étoiles.