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Tom Perkins, un capital-risqueur de la Silicon Valley

Tom Perkins est une des icônes de la Silicon Valley. Je n’ai pas encore lu son autobiographie mais Andre Mercanzini, un collègue de lEPFL, m’a mentionné un intéressant podcats de VentureVoice. Voici donc le point de vue de Perkins sur ce qui rend la Silicon Valley unique:

The difference is in psychology: everybody in Silicon Valley knows somebody that is doing very well in high-tech small companies, start-ups; so they say to themselves « I am smarter than Joe. If he could make millions, I can make a billion ». So they do and they think they will succeed and by thinking they can succeed, they have a good shot at succeeding. That psychology does not exist so much elsewhere.

Steve Jobs à l’Université de Stanford en 2005

Pas de meilleure manière d’initier un blog que de commencer avec Steve Jobs. Jobs fit un discours émouvant en 2005 sur la beauté de la vie. Je le considére comme la meilleure explication de la raison pour laquelle les start-ups sont intimement liées aux parcours individuels. Le site web de Stanford Web fournit texte et video. En voici ma traduction.

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“Vous devez découvrir ce que vous aimez” nous dit Steve Jobs.

Voici le texte du discours de Steve Jobs, PDG d’Apple Computer et des studios d’animation Pixar donné lors de la remise des diplômes de l’université de Stanford le 12 juin 2005.
Je suis honoré d’être avec vous aujourd’hui à la cérémonie de remise des diplômes d’une des meilleures universités de la planète. Je n’ai jamais été diplômé d’une université. En vérité, je n’avais été présent à une telle cérémonie. J’aimerais aujourd’hui vous raconter trois histoires personnelles. C’est tout. Ca n’est pas grand-chose, juste trois histoires.

La première histoire parle de liens entre les choses.

J’ai quitté le Reed College après six mois, mais je suis resté aux alentours comme un touriste (auditeur sans doute plus précis, mais bon) pendant encore dix huit mois avant de partir définitivement. Alors pourquoi ai-je abandonné l’université ?

Cela a commencé avant ma naissance. Ma mère biologique était une jeune étudiante, célibataire, qui décida de me confier à une famille adoptive. Elle était intimement convaincue que je devrais être adopté par une famille éduquée si bien que tout fut planifié pour que je sois adopté à ma naissance par un avocat et son épouse. Sauf que lorsque je vins au monde, ils décidèrent soudainement que c’est une fille qu’ils souhaitaient. Si bien que mes parents qui étaient sur une liste d’attente reçurent un appel téléphonique au milieu de la nuit leur demandant : « Nous avons un bébé garçon non attendu ; le voulez vous ? ». Ils dirent : « Bien sûr. » Ma mère biologique découvrit plus tard que ma mère n’avait jamais reçu de diplôme de l’université et que mon père n’avait pas fini son lycée. Elle refusa de signer les papiers d’adoption définitifs. Elle finit par s’y résigner lorsque mes parents promirent qu’un jour, j’irai à l’université.

Et 17 ans plus tard, j’entrai à l’université. Mais je choisis avec naïveté un endroit presque aussi cher que Stanford, et toutes les économies de mes parents, famille modeste, allaient aux frais d’inscription. Après six mois, je ne vis pas l’intérêt de tout cela. Je n’avais aucune idée de ce que je voulais faire de ma vie et je ne voyais pas comment l’université allait m’aider à trouver la réponse. Et voila que je dépensais tout l’argent que mes parents avaient économisé jusque là. Je décidai de démissionner en étant persuadé que tout finirait par s’arranger. C’était plutôt effrayant à l’époque, mais avec le recul, ce fut une des meilleures décisions que j’ai jamais prises. A parti du moment même où j’étais parti, je n’avais plus à suivre les cours obligatoires, qui ne m’intéressaient pas, et je commençai à suivre ceux qui me semblaient intéressants.

Ca n’était pas tout rose. Je n’avais pas de chambre, et je dormais sur sol de chambres d’amis. Je ramenai les bouteilles de Coca consignées à 5 cents pour m’acheter de quoi manger, et je parcourais à pied chaque dimanche soir, les 11 kilomètres à travers la ville pour m’offrir un bon repas par semaine, au temple Hare Krishna. Je l’adorais. Et beaucoup de sur quoi je suis tombé en suivant ma curiosité et mon intuition se révéla être de grande valeur plus tard. En voici un exemple:

Le Reed College, à cette époque, offrait peut-être la meilleure formation en calligraphie du pays. Sur le campus, chaque affiche, chaque étiquette sur les casiers était magnifiquement tracée à la main. Parce que j’avais abandonné le cursus et que je n’avais plus à suivre les cours normaux, je décidai de suivre ce cours de calligraphie pour apprendre comment faire. J’ai appris la typographie des caractères avec et sans empattement J’ai également appris à varier les espaces entre diverses combinaisons de lettres, à comprendre pourquoi une superbe typographie est superbe. Les subtilités pouvaient être d’ordre esthétique, historique ou artistique d’une manière que la science ne peut pas expliquer et je trouvai cela fascinant.

Rien de tout cela n’avait le moindre espoir d’utilité pratique pour ma vie. Mais dix ans plus tard, quand nous concevions le premier ordinateur Mackintosh, tout cela m’est revenu. Et nous avons tout intégré dans le Mac. C’était le premier ordinateur avec une belle typographie. Si je n’avais pas suivi ce seul cours à l’université, le Mac n’aurait jamais eu de caractères multiples et espacés en proportion. Et si Windows n’avait pas copié le Mac, il est probable qu’aucun ordinateur ne les aurait. Si je n’avais pas tout abandonné à cette époque je ne serais jamais tombé sur ce cours de calligraphie, et les ordinateurs personnels n’auraient peut-être jamais la merveilleuse calligraphie qu’ils ont aujourd’hui. Bien sûr il aurait été impossible de faire le lien entre ces choses a priori, quand j’étais au collège. Mais cela était devenu très, très clair a posteriori, dix ans plus tard.

Encore une fois, il n’est pas possible de faire le lien entre les choses a priori : vous ne pouvez les relier qu’a posteriori. Il faut donc faire confiance aux choses pour se rejoindre à l’avenir. Il faut croire en quelque chose, vos tripes, votre destin, votre vie, votre karma, ce que vous voudrez. Cette approche ne m’a jamais trompée et elle a fait toute la différence dans ma vie.

Ma seconde histoire parle d’amour et d’abandon.

J’ai eu de la chance – J’ai vite su repérer dans ma vie ce que j’aimais faire. Woz et moi avons lancé Apple dans le garage de mes parents quand j’avais vingt ans. Nous travaillions dur, et en dix ans, Apple est partie d’un garage avec nous deux pour devenir une société de plus de 4 000 employés et deux milliards de dollars de ventes. Nous venions de lancé notre plus belle création, le Mackintosh, une année plus tôt et je venais d’avoir trente ans. Puis, je fus viré. Comment peut-on être viré de la société qu’on a lancée ? Eh bien, Apple grandissant, nous recrutâmes quelqu’un que je croyais très talentueux pour diriger la société avec moi, et pendant a peu près un an, tout alla bien. Puis nos visions de l’avenir commencèrent à diverger et finalement il y eut rupture. Le conseil d’administration prit son parti et à trente ans, j’étais dehors. Et de manière très visible. Ce qui avait représenté toute ma vie adulte m’abandonnait. Ce fut une tragédie.

Je n’avais aucune idée de ce que j’allais bien pouvoir faire et cela dura plusieurs mois. J’avais l’impression d’avoir abandonné la génération d’entrepreneurs qui m’avait accompagnée- d’avoir laissé tombé le bâton du relais qui m’était confié. Je rencontrai David Packard et Bob Noyce et je tentai de m’excuser pour avoir aussi lamentablement échoué. C’est un échec très visible et je pensai même à quitter la Vallée. Mais quelque chose commença à renaître en moi – j’aimais toujours ce que je faisais. La tournure des événements chez Apple ne m’avait pas changé d’un iota. Et je décidai donc de tout recommencer.

Je ne l’avais pas ressenti au début mais être viré de chez Apple était la meilleure chose qui pouvait m’être jamais arrivée. Le fardeau du succès céda la place à la légèreté d’être à nouveau un débutant, mois pétri de certitudes. Cette liberté me permit d’entrer dans une des périodes les plus créatives de ma vie.

Pendant les cinq années qui suivirent, je fondai une société appelée NeXT, une autre société, appelée Pixar, et je tombai amoureux de cette personne fabuleuse qui deviendrait ma femme. Pixar parvint à créer le premier dessin animé de synthèse, Toy Story, et est aujourd’hui le studio d’animation le plus puissant du monde. Par un acte du destin étonnant, Apple acheta NeXT ; je retournais chez Apple et la technologie que nous développions chez NeXT est au cœur de la renaissance actuelle d’Apple. Et Laurene et moi avons ensemble une famille merveilleuse.

Je suis à peu près sûr que rien de tout cela ne se serait passé si je n’avais pas été viré d’Apple. Ce fut un traitement très douloureux, mais j’imagine que le patient en avait besoin. Parfois la vie vous frappe comme une pierre en pleine tête. Ne perdez pas la foi. Je suis certain que la seule chose qui me permit de continuer est que j’aimais ce que je faisais. Vous devez découvrir ce que vous aimez. Ceci est vrai pour votre travail comme pour vos amours. Votre travail va remplir une grande partie de votre vie et la seule manière d’être véritablement satisfait est de faire ce que vous croyez être du très bon travail. Et la seule manière de faire du très bon travail est de faire ce que vous aimez. Si vous n’avez pas encore trouvé, continuez à chercher. Ne vous résignez pas. Comme toutes les affaires du cœur, vous saurez quand vous aurez trouvé. Et comme toute grande relation, elle s’améliore et s’embellit avec les années. Alors continuez à chercher jusqu’à ce que vous trouviez. Ne vous résignez pas.

Ma troisième histoire parle de la mort.

Quand j’avais 17 ans, j’ai lu une citation qui disait quelque chose du genre : « Si tu vis chaque jour comme si c’était le dernier, un jour, tu auras certainement raison. » Cela m’impressionna et depuis lors, depuis 33 ans, je me suis regardé chaque matin dans la glace en me demandant : « Si aujourd’hui était le dernier jour de ma vie, est ce que je ferais ce qui je suis sur le point de faire aujourd’hui ? » Et à chaque fois que la réponse était « non » trop de jours d’affilée, je savais que je devais changer quelque chose.

Ne jamais oublier que je vais mourir bientôt est le moyen le plus important que j’ai jamais utilisé pour m’aider à faire les grands choix de mon existence. Parce que presque tout, les espérances, la fierté, la crainte de la honte ou de l’échec, ces choses s’évanouissent face à la mort, ne laissant vivace que ce qui compte vraiment. Ne pas oublier que l’on va mourir est le meilleur moyen que je connaisse d’éviter le piège de penser que l’on a quelque chose à perdre. Vous êtes déjà à nu. Il n’y a aucune raison de ne pas suivre les aspirations de son cœur.

Il ya environ un an, un cancer m’a été diagnostiqué. J’ai subi un scanner à 7h30, un matin, qui montra clairement une tumeur au pancréas. Je ne savais même pas ce qu’était le pancréas. Les médecins m’annoncèrent qu’il s’agissait certainement d’un type de cancer incurable, et que je ne devais pas espérer vivre plus de 3 à 6 mois. Mon médecin me conseilla de rentrer chez moi et de mettre mes affaires en ordre, ce qui est la manière de la profession médicale de vous préparer à mourir. Cela signifie d’essayer de dire à vos enfants en quelques mois tout ce que vous pensiez avoir le temps de leur dire dans les dix prochaines années. Cela signifie être sûr que tout est planifié pour faciliter l’avenir de votre famille. Cela signifie dire au revoir.

Toute cette journée là, j’ai vécu avec ce diagnostic. Plus tard, dans la soirée, on m’a fait une biopsie. On m’a glissé en endoscope dans la gorge, à travers mon estomac et mes intestins, on a enfoncé une aiguille dans mon pancréas pour prélever quelques cellules de la tumeur. J’étais sous anesthésie, mais ma femme, qui m’accompagnait, m’a raconté que lorsque les médecins virent les cellules au microscope, ils se mirent à pleurer car il se trouva que j’avais une forme très rare de cancer du pancréas qui peut être soignée par chirurgie. J’ai subi une intervention chirurgicale et je vais bien aujourd’hui.

Il s’agit de ma plus proche expérience de la mort, et j’espère que ce sera la plus proche que j’aurai connue pour les dizaines d’années à venir. Ayant vécu tout cela, je peux vous en parler avec un peu plus de certitude que lorsque la mort n’était pour moi qu’un concept, certes utile, mais purement intellectuel.

Personne ne souhaite mourir. Même ceux qui rêvent du paradis ne veulent pas mourir pour y monter. Et pourtant la mort est la destination que nous partageons tous. Personne n’y a jamais échappé. Et c’est ainsi que cela doit être, parce que la Mort est sans doute la plus belle invention de la Vie. Elle l’agent du changement pour la Vie. Elle nettoie l’ancien pour laisser la place au neuf. Vous êtes le neuf, mais un jour, pas si éloigné, vous deviendrez progressivement l’ancien et vous serez nettoyé. Désolé d’être aussi tragique, mais c’est la vérité.

Votre temps est compté, alors ne le gaspillez pas à vitre la vie d’autrui. Ne restez pas prisonnier des dogmes, c’est-à-dire du résultat des pensées d’autrui. Ne laissez pas le bruit des opinions assourdir votre propre voix intérieure. Et plus important encore, ayez le courage de suivre votre cœur et votre intuition. Ils savent quelque part déjà ce que vous voulez vraiment devenir. Tout le reste est secondaire.

Quand j’étais jeune, il y avait une publication fantastique, intitulé le Catalogue Whole Earth, qui était une des bibles de ma génération. Il avait été créé par un homme qui s’appelait Steward Brand, pas loin d’ci à Menlo Park et celui-ci l’avait produit avec une touche poétique. C’était à la fin des années soixante, avant les ordinateurs personnels et la bureautique, alors il était fait à l’aide de la machine à écrire, des ciseaux et des appareils Polaroid. C’était une sorte de Google en papier, 35 ans avant l’arrivée de Google : il était idéaliste et débordant de jolis trucs et de grandes idées.

Stewart et son équipe publièrent plusieurs éditions du Catalogue Whole Earth et la vie suivant son cours, le dernier numéro fut publié. C’était au milieu des années soixante-dix et j’avais votre âge. Sur la quatrième de couverture de ce dernier numéro, il y avait une photographie d’une route de campagne au petit matin, le genre de celles que vous parcourez peut-être en joggant si vous êtes un peu curieux. Au dessous, se trouvaient les mots : « Restez insatiable. Restez fou ». C’était leur message d’adieu au moment de tout arrêter. Et j’ai me suis toujours souhaité de le rester. Et maintenant que vous allez recevoir votre diplôme et entrer dans la nouveauté, je vous le souhaite également.

Restez insatiable. Restez fantaisiste.

Merci beaucoup.