Les start-up expliquées à ma fille par Guillene Ribière

Les start-up expliquées à ma fille par Guillene Ribière est un excellent petit ouvrage (118 pages) qui démystifie le monde des start-up tout en faisant une description précise, honnête et … amusante par les images que l’auteur utilise. Comme le titre l’indique chacun devrait l’offrir à sa fille ou à son fils d’ailleurs. Mais comme je constate régulièrement que la proportion des jeunes filles entrepreneurs est de l’ordre de 10% à 20% de cette population assez unique, l’effort doit sans doute être redoublé pour nos filles.

L’ouvrage est à la fois riche en données et en conseils. Je n’en donnerai dans ce premier post que quelques exemples. Comme la fille de l’auteur se plaint du trop grand soutien donné aux start-up, Guillene Ribière donne des chiffres: sans doute 2000 startup créées par an en France (environ 300 en Suisse pour la comparaison). Le soutien public moyen serait de 130000 euros (répartis en 50000 de financement, 48000 de soutien par pôle emploi et 30000 en accompagnement – page 8). J’ai calculé grâce à elles que les 150 meilleures startup génèrent individuellement environ 15 millions d’euros de chiffre d’affaire annuel [Page 9].

Quant aux investisseurs, ils doivent aimer le risque car selon elle, sur 10 start-up 5 meurent, 4 survivent et une réussit très bien (page 11). A titre de comparaison Josh Lerner indiquait en 2002 [1] qu’une entrée en bourse rapportait en moyenne 2.95x l’investissement initial en 4.2 années, une acquisition 1.4x la mise en 3.7 années, qu’un investissement sur 6 (16%) était une petite totale, et que 45% des investissements était une perte. Si on retire les 9% les plus performants on passe d’un gain de 19% à une perte… Cela me parait cohérent!

Les conseils de Guillene Ribière sont tout aussi éclairants:

Lélia: Qu’est-ce qui donne à penser à cette équipe qu’elle va réussir? Elle a une chance sur deux de déposer le bilan selon les statistiques.
Estelle: Parfois rien du tout! Ils y croient, c’est tout. Et c’est un des puissants facteurs de réussite. Cette envie profonde est une baguette magique pour start-up.
[Page 12] L’auteur a aussi le don pour expliquer le « marché » et le « besoin client » avec une simplicité lumineuse!

A suivre mais surtout à lire!

[1] Josh Lerner When Bureaucrats Meet Entrepreneurs: the Design of Effective ‘Public Venture Capital’ Programnes. The Economic Journal, 112 (February), F73±F84.Royal Economic Society 2002

Un article du New Yorker sur deux développeurs de Google: l’amitié qui a rendu Google énorme

Le New Yorker vient de publier un bel article sur deux développeurs de Google. The Friendship That Made Google Huge (L’amitié qui a rendu Google énorme) est sous-titrée Coding together at the same computer, Jeff Dean and Sanjay Ghemawat changed the course of the company—and the Internet (En codant ensemble sur le même ordinateur, Jeff Dean et Sanjay Ghemawat ont changé le cours de la société et l’Internet).



Les meilleurs codeurs de la société semblent être les deux moitiés d’un même esprit.
Illustration de David Plunkert

Voici quelques extraits:

Sanjay Ghemawat, [est] un diplômé du MIT de trente-trois ans, silencieux, avec les sourcils épais et les cheveux noirs grisonnants aux tempes. Sanjay avait rejoint la société quelques mois auparavant, en décembre. Il avait suivi un de ses collègues, Jeff Dean, un jeune homme âgé de 31 ans et énergique, de Digital Equipment Corporation. Jeff avait quitté DEC dix mois avant Sanjay. Ils étaient exceptionnellement proches et préféraient écrire du code conjointement. Dans la salle des combats, Jeff se dirigea vers le bureau de Sanjay, laissant le sien vide. Sanjay travaillait au clavier pendant que Jeff s’inclinait à côté de lui, corrigeant et cajolant comme un producteur à l’oreille d’un présentateur.
[…]
Aujourd’hui, les ingénieurs de Google font partie d’une grande chaîne qui commence au niveau 1. En bas se trouve le personnel de soutien en IT. Les niveaux 2 sont fraîchement sortis du collège; Les niveaux 3 ont souvent une maîtrise. Atteindre le niveau 4 prend plusieurs années, ou un doctorat. La plupart des progressions s’arrêtent au niveau 5. Les ingénieurs de niveau 6 – les 10% les plus performants – sont si capables qu’ils pourraient être considérés comme la raison du succès d’un projet. Les niveaux 7 sont des niveaux 6 avec une longue expérience. Les ingénieurs principaux, les niveaux 8, sont associés à un produit majeur ou à un élément d’infrastructure. Les ingénieurs distingués, les niveaux 9, sont évoqués avec révérence. Devenir Google Fellow, le niveau 10, c’est gagner un honneur qui vous suivra toute la vie. Les Google Fellows sont généralement des experts mondiaux dans leur domaine. Jeff et Sanjay sont des Senior Fellows de Google, les premiers et les seuls de niveau 11 de la société.

Et plus sur la créativité en binôme. Assez fascinant!

Il a fallu que Monet et Renoir, travaillant côte à côte à l’été de 1869, développent le style qui devint l’impressionnisme; Au cours des six années de collaboration qui ont donné naissance au cubisme, Pablo Picasso et Georges Braque ne signaient souvent que le verso de leurs toiles, afin d’observer lequel de ceux-ci avait achevé chaque peinture.
[…]
Dans «Powers of Two: Trouver l’essence des innovations dans des couples créatifs», l’écrivain Joshua Wolf Shenk mentionne une interview de 1971, dans laquelle John Lennon expliquait que lui-même ou Paul McCartney « écrivait la bonne part, créée simplement comme si je lisais les nouvelles aujourd’hui ou quoi que ce soit. » Le premier resterait alors coincé jusqu’à ce que l’autre arrive – puis, Lennon déclara: « Je chantais à moitié et cela l’inspirait pour écrire la suite et vice versa. »
[…]
François Jacob, qui, avec Jacques Monod, a été l’un des pionniers de l’étude de la régulation des gènes, a fait remarquer qu’au milieu du XXe siècle, la plupart des recherches dans le domaine en plein essor de la biologie moléculaire étaient le résultat de deux vies.

Vous devriez lire l’article …

Startup Suisses : des analyses nouvelles, sans véritable surprise…

Un nouveau et intéressant rapport sur les startup suisses vien d’être publié par Startupticker, le Swiss Startup Radar.

On y voit une information assez nouvelle, le nombre de startup créées par an, environ 300,

et leur faible croissance…

Des témoignages intéressants également:

Est-ce à cause des conditions-cadres, comme on le dit souvent? (Page 48)
Non, le cadre réglementaire et fiscal de la Suisse est de premier ordre. Mais j’identifie deux lacunes. D’abord, il manque de structures destinées aux entrepreneurs qui ne font de la haute technologie. Ensuite, nous ciblons essentiellement les jeunes alors que des personnes d’autres classes d’âges aussi lancent des entreprises.

Les moyens financiers mis à part, quelles sont les autres différences entre les deux écosystèmes? (Page 57)
En Suisse, j’observe un focus sur ce qu’on appelle le taux de survie. Les startups sont soutenues si elles disposent de garanties – par exemple sous forme de brevets – et si elles sont prudentes. C’est pourquoi 8 startups de l’EPF de Zurich sur 10 sont encore actives cinq ans après leur création. En Israël, par contre, on accorde davantage d’attention à l’impact économique. Ce qui compte, c’est la perspective de croissance et la création d’emplois.

Les investisseurs sont davantage conscients du fait que financer des startups peut entraîner des pertes. C’est flagrant dans le capital d’amorçage. En Suisse, on présente des projets avec des plans d’affaires détaillés, des présentations PowerPoint et des projections de ventes jusqu’en 2023. En Israël, cette paperasserie a largement disparu. Les Business Angels et professionnels du capital-risque admettent qu’il ne peut y avoir de sécurité absolue.

Dans un article de Techcrunch, 30 European startup CEOs call for better stock option policies, on y parle aussi des lacunes dans les conditions cadres en Suisse:

avec les recommandations suivantes:
1- Créer un système de stock-options ouvert au plus grand nombre de jeunes entreprises et d’employés, offrant un traitement favorable en termes de réglementation et de fiscalité. Concevoir un modèle basé sur les modèles existants au Royaume-Uni, en Estonie ou en France pour éviter toute fragmentation et complexité supplémentaires.
2- Autoriser les startup à émettre des stock-options sans droits de vote, afin d’éviter d’avoir à consulter un grand nombre d’actionnaires minoritaires.
3- Reporter l’imposition des employés au moment de la vente des actions lorsque les employés reçoivent un avantage en espèces pour la première fois.
4- Autoriser les startups à émettre des stock-options sur la base d’une «évaluation de la juste valeur du marché» (Fair market value), ce qui dissipe les incertitudes fiscales
5- Appliquer des taux d’imposition sur la base du gain en capital (ou mieux) pour la vente d’actions des employés.
6- Réduire ou supprimer les impôts sur les sociétés associés à l’utilisation de stock-options.

Harari est déjà de retour! 21 leçons pour le 21ème siècle (2ème partie)

Un autre court article après mon premier article sur le nouveau livre de Harari, 21 Lessons for the 21st Century. Harari est clairement un penseur ambitieux, profond et impressionnant. Alors que ses premiers chapitres m’inquiétaient un peu, ceux du milieu sont excellents. Je vais vous donner quelques exemples ci-dessous. Mais regardons d’abord les sous-titres de toutes ces 21 leçons:

Partie I: Le défi technologique
1. DÉSILLUSION – La fin de l’histoire a été reportée
2. TRAVAIL – Quand tu seras grand, tu n’auras peut-être pas de travail
3. LIBERTE – Le Big Data vous surveille
4. ÉGALITÉ – Ceux qui possèdent les données sont propriétaires de l’avenir

Partie II: Le défi politique
5. COMMUNAUTÉ – Les humains ont un corps
6. CIVILISATION – Il n’y a qu’une seule civilisation dans le monde
7. NATIONALISME – Les problèmes mondiaux ont besoin de réponses globales
8. RELIGION – Dieu sert maintenant la nation
9. IMMIGRATION – Certaines cultures pourraient être meilleures que d’autres

Partie III: Le désespoir et l’espoir
10. TERRORISME – Ne paniquez pas
11. GUERRE – Ne jamais sous-estimer la stupidité humaine
12. HUMILITÉ – Vous n’êtes pas le centre du monde
13. DIEU – N’utilisez pas le nom de Dieu en vain
14. SÉCULARISME – Connaissez vos zones ombre

Partie IV: La vérité
15. IGNORANCE – Vous en savez moins que vous ne le pensez
16. JUSTICE – Notre sens de la justice pourrait être dépassé
17. POST-VÉRITÉ – Certaines fausses nouvelles durent à jamais
18. SCIENCE-FICTION – L’avenir n’est pas ce que vous voyez dans les films

Partie V: Résilience
19. ÉDUCATION – Le changement est la seule constante
20. SIGNIFICATION – La vie n’est pas une histoire
21. MÉDITATION – Observez simplement

Dans son 14ème chapitre, la laïcité, il utilise quelques mots-clés très éclairants. Si c’est déroutant pour vous, vous devrez lire son livre. La laïcité est définie par un ensemble cohérent de valeurs: vérité, compassion, égalité, liberté, courage et responsabilité [Pages 203-14]. Dans son chapitre suivant, Ignorance, il présente une analyse très intéressante du pouvoir et de la vérité: il est extrêmement difficile de découvrir la vérité lorsque vous dirigez le monde. On est trop occupé. La plupart des chefs politiques et des magnats des affaires vivent toujours dans l’urgence. Cependant, si on souhaite approfondir un sujet, on a besoin de beaucoup de temps, et en particulier du privilège de perdre du temps. On doit expérimenter des chemins improductifs, explorer des impasses, laisser la place aux doutes et à l’ennui. Si on ne peut pas se permettre de perdre du temps, on ne trouve jamais la vérité. […] On doit perdre beaucoup de temps à la périphérie: elles contiennent peut-être quelques idées révolutionnaires brillantes, mais elles sont généralement remplies de suppositions non informées, de modèles démentis, de dogmes superstitieux et de théories du complot ridicules. Les leaders sont ainsi pris au piège dans une double impasse. S’ils restent au centre du pouvoir, ils auront une vision extrêmement déformée du monde. S’ils s’aventurent à la marge, ils perdront trop de leur temps précieux. [Pages 220-2]

Grigori Perelman selon Masha Gessen

J’avais brièvement mentionné Grigori Perelman dans un post assez ancien: 7 x 7 = (7-1) x (7+1) + 1. J’ai récemment découvert un nouveau livre sur ce mathématicien exceptionnel, non pas tant sur ses réalisations, mais davantage sur sa personnalité.

A propos du syndrome d’Asperger

Je ne vais pas raconter ici ce que Masha Gessen fait avec talent, mais tout de même citer un passage sur les Asperger: « Il me semble que nombre de lanceurs d’alertes, écrivit Atwwod, sont atteints du syndrome d’Asperger. J’en ai rencontré plusieurs qui appliquaient à leur travail le code de déontologie de leur entreprise ou du gouvernement et avaient dénoncé des entorses au règlement et de la corruption. Tous se sont étonnés ensuite de voir que leur direction et leurs collègues ne comprenaient guère leur attitude. »
Ce n’est donc peut-être pas un hasard si les fondateurs des mouvements dissidents en Union soviétique se trouvaient parmi les mathématiciens et les physiciens. L’Union soviétique n’était pas l’endroit idéal pour les gens qui prenaient les choses au sens littéral et s’attendaient à ce que le monde fonctionne de façon prévisible, logique et juste.
[Pages 215-6]
[…]
On peut également interpréter ainsi les difficultés qu’il éprouvait lorsqu’il présentait ses solutions. Si Perelman souffrait du syndrome d’Asperger, cette incapacité à voir « la grande image » en est peut-être un des traits les plus surprenants. Les psychologues britanniques Uta Frith et Francesca Happe ont parlé de ce qu’elles appellent la « faible cohérence centrale », caractéristique des troubles du spectre autistique. les autistes se concentrent sur les détails, au détriment de l’image globale. Lorsqu’ils parviennent à la reconstituer, c’est parce qu’ils en ont arrangé les divers éléments, un peu comme les éléments de la table périodique, dans un schéma systémique qui les satisfait à l’extrême. « … les faits les plus intéressants, écrivit Poincaré, l’un des plus grands esprits systémisants de tous les temps, il y a plus d’un siècle, sont ceux qui peuvent servir plusieurs fois, ce sont ceux qui ont une chance de se renouveler. Nous avons eu le bonheur de naitre dans un monde où il y en a. Supposons qu’au lieu de soixante éléments chimiques nous en ayons soixante milliards, qu’ils ne soient pas les uns communs et les autres rares, mais qu’ils soient répartis uniformément. Alors toutes les fois que nous ramasserions un nouveau caillou, il y aurait une grande probabilité pour qu’il soit formé de quelques substances inconnue. […] Dans un pareil monde, il n’y aurait pas de science; peut-être la pensée et même la vie y seraient-elles impossibles puisque l’évolution n’aurait pas pu y développer les instincts conservateurs. Grâce à Dieu, il n’en est pas ainsi. »
Les personnes atteinte du syndrome d’Asperger appréhendent le monde petit caillou par petit caillou. En parlant de l’existence de ce syndrome dans la société, Attwood recourait à la métaphore d’un puzzle de cinq mille pièces, « où les gens normaux disposeraient de l’image complète sur le couvercle » ce qui leur permmettrait d’avoir des intuitions globales. Les Asperger, eux, ne verraient pas cette grande image et devraient essayer d’imbriquer les morceaux un par un. Ainsi, peut-être que les règles telles que « n’ôte jamais ta chapka » et 2lis tous les livres qui sont inscrits sur la liste » formaient pour Gricha Perelman un moyen de voir l’image manquante sur le couvercle, d’englober tous les éléments de la table périodique du monde. C’était seulement en s’accrochant à ces règles qu’il pouvait vivre sa vie.
[Pages 217-8]

A propos du pouvoir

Un autre sujet intéressant abordé par Misha Gessen se trouve page 236:
– Lorsqu’il a reçu la lettre de la commission qui l’invitait il a répondu qu’il ne parlait pas avec les comités, s’exlama gromov, et c’est exactement ce qu’il faiut faire. Ils représentent tout ce que l’on ne devrait jamais accepter. Et si cette attitude paraît extrême, ce n’est que par rapport au conformisme qui caractérise le monde des mathématiques.
– Mais pourquoi refuser de parler aux comités?
– On ne parle pas aux comités, on parle à des gens! s’écria Gromov, exaspéré. Comment peut-on parler à un comité? Qui sait qui fait partie des comités? Qui vous dit que Yasser Arafat n’en fait pas partie?
– Mais on lui a envoyé la liste des membres, et il a continué à refuser.
– De la manière dont cela avait commencé, il avait bien raison de ne pas vouloir répondre, persiste Gromov. Dès qu’une communité commence à se conduire comme une machine, il ne reste plus qu’à couper les ponts, un point c’est tout. Le plus étrange, c’est qu’il n’y ait plus de mathématicien qui en fasse autant. C’est ça qui est bizarre. La plupart des gens acceptent de traiter avec des comités. Ils acceptent d’aller à Pékin et de recevoir un prix des mains du président Mao. Ou du roi d’espagne, de toute façon, cela revient au même!
– Et pourquoi, demandai-je, le roi d’Espagne ne pourrait-il pas avoir l’honneur d’accrocher une médaille au cou de Perelman?
– Qu’est-ce que c’est un roi? demanda gromov, totalement furieux à présent. Les rois, ce sont les mêmes crétins que les communistes. Pourquoi un roi décernerait-il une médaille à un mathématicient? Qu’est-ce qui le lui permet? Il n’est rien d’un point de vue mathématique. Pareil pour le président. Mais il y en a un qui a fait main basse sur le pouvoir comme un brigand et l’autre qui l’a hérité de son père. Cela ne fait aucune différence.
Contrairement à eux, m’explique encore Gromov, Perelman avait apporté au monde une véritable contribution.

Cela me rappelle la citation d’un collègue: « on ne trouve pas beaucoup de statues pour les comités dans les parcs publics. »

Il vaut probablement la peine d’ajouter ici un article du New Yorker que Gessen mentionne également: Manifold Destiny. A legendary problem and the battle over who solved it par Sylvia Nasar et David Gruber. Sur un sujet connexe, les auteurs citent Perelman, qu’ils ont rencontré: Il a mentionné un différend qu’il avait eu des années plus tôt avec un collaborateur sur la façon de créditer l’auteur d’une preuve particulière, et s’est déclaré consterné par l’éthique laxiste de la discipline. « Ce ne sont pas les gens qui enfreignent les normes éthiques qui sont considérés comme des extraterrestres », a-t-il déclaré. « Ce sont des gens comme moi qui sont isolés. » Nous lui avons demandé s’il avait lu l’article de Cao et Zhu. « Je ne sais pas quelle nouvelle contribution ils ont apportée », a-t-il déclaré. « Apparemment, Zhu n’a pas bien compris l’argument et l’a retravaillé. » Quant à Yau, Perelman a déclaré: « Je ne peux pas dire que je suis outré. Les autres font pire. Bien sûr, il y a beaucoup de mathématiciens qui sont plus ou moins honnêtes. Mais presque tous sont conformistes. Ils sont plus ou moins honnêtes, mais ils tolèrent ceux qui ne le sont pas. »

Harari est déjà de retour! 21 leçons pour le 21ème siècle

Quand j’ai vu le troisième livre de Harari, j’ai eu quelques inquiétudes. Pourrait-il écrire un autre très bon livre après l’extraordinaire Sapiens, mais le moins bon Homo Deus? Et pourquoi aussi vite?

Et en effet, la première partie de 21 Lessons for the 21st Century est effrayante pour ne pas dire très mauvaise. Elle est plein d’inquiétude, pour ne pas dire anxiogène, et je ne suis pas sûr qu’elle soit basée sur des faits ou même sur des vérités comme ses précédents livres… En effet, cette première partie est même trompeuse, car lorsque j’ai lu « Sapiens explorait le passé, Homo Deus explorait le futur et 21 leçons explore le présent » sur la couverture du livre, j’ai découvert que la première partie traitait d’un possible futur effrayant basé sur l’intelligence artificielle et la biotechnologie. Mais c’est le futur, pas le présent.

Heureusement, j’ai retrouvé le Harari que j’aime au début de la deuxième partie. Au chapitre 5, Communauté, il montre que nous sommes des êtres réels, physiques et non virtuels, augmentés. Au chapitre 6, Civilisation, il combat le concept de choc des civilisations. Le sous-titre est « il y a une civilisation dans le monde ». Alors permettez-moi de citer Harari ici [Pages 94-5]

Plus important encore, l’analogie entre l’histoire et la biologie qui sous-tend la thèse du «choc des civilisations» est fausse. Les groupes humains – des petites tribus aux grandes civilisations – sont fondamentalement différents des espèces animales et les conflits historiques sont très différents des processus de sélection naturelle. Les espèces animales ont des identités objectives qui perdurent pendant des milliers et des milliers de générations. Que vous soyez un chimpanzé ou un gorille dépend de vos gènes plutôt que de vos croyances, différents gènes dictent des comportements sociaux distincts. Les chimpanzés vivent dans des groupes mixtes de mâles et de femelles. Ils sont en concurrence pour le pouvoir dans des coalitions de partisans parmi les deux sexes. Parmi les gorilles, Au contraire, un seul mâle dominant établit un harem de femelles et expulse habituellement tout mâle adulte susceptible de remettre en cause sa position. Les chimpanzés ne peuvent pas adopter des arrangements sociaux semblables à ceux des gorilles; les gorilles ne peuvent pas commencer à s’organiser comme des chimpanzés; et pour autant que nous sachions, les chimpanzés et les gorilles ont été caractérisés non seulement par des systèmes sociaux pendant les dernières décennies, mais aussi pendant des centaines de milliers d’années.
Vous ne trouvez rien de tel chez les humains. Oui, les groupes humains peuvent avoir des systèmes sociaux distincts, mais ceux-ci ne sont pas déterminés génétiquement et ils durent rarement plus de quelques siècles. Pensez aux Allemands du vingtième siècle, par exemple. En moins de cent ans, les Allemands se sont organisés en six systèmes très différents: l’empire des Hohenzollern, la République de Weimar, le Troisième Reich, la République démocratique allemande (aussi appelée Allemagne de l’Est communiste), la République fédérale d’Allemagne (dite Allemagne de l’Ouest), et enfin l’Allemagne réunifiée démocratique. Bien sûr, les Allemands ont gardé leur langue et leur amour de la bière et des saucisses grillées. Mais existe-t-il une essence allemande unique qui les distingue de toutes les autres nations et qui est restée inchangée, de Wilhelm II à Angela Merkel? Et si vous venez avec quelque chose, était-ce aussi le cas il y a 1000 ans ou il y a 5000 ans?

Humour et bureaucratie (2e partie)

Ceci est la deuxième et dernière partie d’un sujet inhabituel de ce blog, l’humour et la bureaucratie. Vous pouvez voir la partie I si vous l’avez manquée.

L’auteur a un commentaire à la fin, qui est intéressant. «Le problème avec toi, c’est que tu refuses de prendre quoi que ce soit au sérieux – pas le communisme, pas moi… pas même toi-même.» «C’est vrai, ai-je dit : ‘Mais je ne prends très au sérieux, de ne jamais rien prendre au sérieux.’ »[Page 307]

‘L’économie communiste était très mauvaise pour produire quoi que ce soit – sauf les blagues. Ils étaient très doués pour les blagues.´ [Page 222]

De nombreuses blagues communistes ont été adaptées en faisant référence aux faiblesses des économies occidentales. « Pourquoi une Austin Allegro a-t-il une fenêtre arrière chauffante? Vous pouvez ainsi garder vos mains au chaud lorsque vous la poussez ». [Page 300]

Comment un Juif russe intelligent peut-il parler à un Juif russe stupide?
Par téléphone de New York.
[Page 211]

Quelle est la définition d’un quatuor à cordes russe?
Un orchestre soviétique de retour d’une tournée américaine.
[Page 212]

Savez-vous pourquoi la Roumanie survivra à la fin du monde?
Parce que elle est cinquante ans derrière tout le monde!
[Page 263]

Ma préférée suit…

Leonid Brejnev voulait commander un portrait intitulé « Lénine en Pologne ». Les peintres russes, strictement formés à l’école réaliste, étaient incapables de peindre un événement qui ne s’était jamais produit,
´Camarade Brejnev, nous aimerions le faire, mais nous ne pouvons pas. Cela va à l’encontre de notre formation’, a répondu chacun des artistes approchés par Brejnev. Finalement, désespéré, Brejnev fut obligé de demander au vieux peintre juif Lévy.
Bien sûr, je préfère représenter des événements réels, mais je ferai le tableau pour vous, camarade. Ce serait mon grand honneur.´ Lévy commença à travailler sur la peinture.
Enfin, le jour du dévoilement est arrivé. Tout le monde a le souffle coupé lorsque le tissu est retiré pour révéler la photo d’un homme couché avec une femme qui ressemble à la femme de Lénine.
Brejnev demanda, horrifié: «Qui est cet homme?
«C’est Trotsky, dit l’artiste.
«Et qui, demanda Brejnev, est cette femme?
«C’est l’épouse de Lénine, camarade Brejnev.
«Mais où est Lénine?
«Il est en Pologne, expliqua Lévy.

[Page 207]

Maintenant, vous voudrez peut-être explorer le ivre et trouver vos préférées…

Pourquoi Aaron Swartz est-il mort?

Pour faire suite à mon article précédent Aaron Swartz – L’idéaliste, voici quelques notes supplémentaires tirées de ce livre très émouvant et intelligent.

Alors pourquoi est-il mort? Vous devez lire le livre. Mais voici une phrase se trouve vers la fin [page 268]: « Swartz a vu les choses différemment et a en effet consacré une grande partie de sa vie à l’idée que le seul moyen d’améliorer le monde était de permettre aux gens de s’ouvrir. Cette notion […] est l’héritage de Swartz. C’est aussi son défi envers le monde qu’il a laissé derrière lui. »

Les entreprises continuent de faire appliquer la loi et la rhétorique pour lutter contre l’éthique situationnelle du téléchargement non autorisé, pour faire valoir que le droit d’auteur est un jeu à somme nulle. Les conflits se reproduisent. Les acteurs peuvent changer, mais le script reste le même. [Page 271]

Un argument surprenant contre Apple et Steve Jobs: Swartz a décrit Apple comme «une organisation impitoyable et autoritaire» bafouant les normes du travail et Jobs lui-même comme un martinet qui insistait pour contrôler tous les aspects de l’expérience utilisateur. Sa mégalomanie se manifestait dans les baladeurs Apple: des rectangles blancs stériles qui ne peuvent être ni ouverts ni modifiés par l’utilisateur final. » Jobs ne pouvait pas supporter les gens qui ouvrent les choses ». [Page 267]

Citation plus forte encore et extraite du blog de Swartz: Comme il est démontré que le pouvoir sur les êtres humains leur permet de faire ce qu’ils préféreraient ne pas faire, l’homme qui est motivé par l’amour du pouvoir est plus susceptible de faire souffrir que de permettre le plaisir. Si vous demandez à votre patron de vous absenter du bureau à une occasion légitime, son amour du pouvoir tirera plus de satisfaction d’un refus que d’un consentement. Si vous avez besoin d’un permis de construire, le petit fonctionnaire concerné aura évidemment plus de plaisir à dire «Non» que de dire «Oui». C’est ce genre de chose qui fait de l’amour du pouvoir un motif aussi dangereux. – Bertrand Russell [Page 254]

Peters aimerait avoir une vision équilibrée de la situation: les détenteurs de biens ne sont qu’une partie au contrat social. Cela est censé régir notre politique, et leurs intérêts ne sont pas les seuls à compter. Il existe un compromis entre le droit d’auteur fonctionnellement éternel et l’anarcho-syndicalisme de masse. [Page 268]

Qu’est-ce que l’innovation ?

Alors, qu’est-ce que l’innovation? J’avais déjà abordé la question en 2015 dans Invention, Entrepreneuriat et Innovation. Mon collègue Federico m’a donné il y a quelques jours une autre définition de l’innovation de Bill Aulet du MIT.

Innovation = Invention * Commercialisation

Vous trouverez la vidéo ici.

Et voici quelques extraits:

Est-ce que cela aurait pu être “L’innovation est synonyme d’invention?” Non, souvent les gens confondent ces deux choses. Elles ne sont pas identiques. L’innovation est quelque chose qui génère de la valeur pour le monde. Cela rend quelque chose plus rapide, meilleur, moins cher. Cela donne une grande satisfaction à quelqu’un. Une invention est une idée, une technologie, un brevet. En soi, elle ne génère pas de valeur. Donc, elles ne sont pas la même chose. Et parfois vous les voyez interchangées. Et ce n’est pas correct.

Donc, l’innovation est synonyme de commercialisation fois l’invention. Et quand on regarde cette équation de l’innovation, quelque chose de valeur, cela nécessite une nouvelle idée. Et puis, il faut que quelqu’un ou une organisation qui commercialise cette idée et créee de la valeur pour le monde. Il est donc important de comprendre qu’une idée en soi n’a pas de valeur. Les idées sont bon marché. C’est la commercialisation, combinée à l’invention, qui les rend extraordinairement précieuces. Auparavant, j’avais l’habitude de dire invention plus commercialisation, en fait, c’est fois. (Pas une addition, une multiplication)

C’est un produit parce que si je n’en ai pas, c’est zéro. Alors, je n’ai aucune innovation. Si je n’ai pas d’idée nouvelle, je ne peux rien commercialiser. Par conséquent, c’est zéro. Si j’ai une invention et pas de commercialisation, je n’ai pas d’innovation. Donc, c’est en fait un produit. C’est, en fait, l’aspect commercial de cette opération qui est très, très difficile.

Si l’on considère l’entreprise la plus innovante au monde à l’heure actuelle, à savoir Apple, les inventions sous-jacentes qui ont créé Apple, les grandes innovations commençant par le Mac, ne sont pas venues d’elle-même. Cela venait en fait de Xerox PARC. C’était des fenêtres, une icône, une souris, un pointeur. Ces inventions, ils les ont commercialisées pour créer de l’innovation, ce qui a créé une valeur formidable sur le marché et pour leurs clients et pour eux-mêmes, leurs investisseurs aussi. De même, après cela, regardez cette autre invention sous-jacente et potentielle, la technologie de l’iPod, le MP3, ne venait pas encore d’Apple. Cela venait de Fraunhofer. Mais ce qui a été formidable pour Apple, c’est la commercialisation pour créer de l’innovation et, encore une fois, créer de la valeur pour leurs clients et leurs actionnaires. Donc, c’est cette définition de l’innovation que nous avons trouvée très utile pour montrer que l’innovation est une combinaison d’une nouvelle idée, d’une nouvelle technologie, mais qui doit alors, être commercialisée et mise en correspondance avec un client dans le monde réel, où elle générera de la valeur.

Merci Federico ?

Google a 20 ans

Google a été incorporé en Californie le 4 septembre 1998, alors la société a juste 20 ans aujourd’hui. La technologie est plus ancienne, elle s’appelait BackRub initialement (en 1996) et était un site web interne à l’université de Stanford, google.stanford.edu et en septembre 1997, google.com a été enregistré comme un site web indépendant. Vous pouvez voir ci-dessous quelques images historiques

et les différents logos

Il y a eu beaucoup de livres sur Google, dont quelques très bons. J’ai blogué sur la plupart d’entre eux, Work Rules! il y a quelques semaines, In The Plex au milieu de 2015, How Google Works à la fin de 2014, Dogfight au début de 2014, I’m Feeling Lucky en 2012 et en effet, j’ai beaucoup blogué sur la société comme vous pouvez le voir sur le tag Google.

Si Fairchild fut la startup emblématique de la Silicon Valley, fondée dans les années 50, elle a été suivie par Intel dans les années 60, Apple dans les années 70, les années 80 ont vu Cisco et Sun Microsystems, et Google symbolise les années 90 (Yahoo pourrait bientôt être oubliée). Facebook appartient aux années 2000, la décennie 2010 est encore ouverte je pense. Mais les leçons tirées des années de Google sont uniques. La technologie, le produit, la croissance de la startup, les équipes viennent changer notre regard sur les business pour le meilleur et parfois le moins bon…