Archives de catégorie : Donnée Start-up

Le capital risque, une solution universelle?

Comme suite à mon post de vendredi, voici une chronique que je commence à l’EPFL pour parler de start-up. je me permets de la relayer ici. J’y parle de Aleva, belle start-up en croissance et de capital-risque. La voici donc:

10.02.12 – Aleva Neurotherapeutics est parvenue à lever 10 millions de capital-risque. La start-up de l’EPFL démontre que ce mode de financement n’est pas hors de portée des jeunes entreprises suisses.

Pour ce billet inaugural à la rubrique «la start-up du mois», je me devais de parler d’Aleva Neurotherapeutics. Andre Mercanzini, son fondateur, a obtenu son doctorat au Laboratoire de microsystèmes (LMIS4) de Philippe Renaud. Pourquoi cette motivation ? Parce qu’Andre est emblématique de l’entrepreneur passionné et persévérant. Il a obtenu un Innogrant en 2008, cette bourse qui permet aux apprenti-entrepreneurs de se consacrer à leur projet de start-up pendant un an. La vie d’entrepreneur n’est pas un long fleuve tranquille, et il y faut non seulement de l’enthousiasme mais aussi du courage. Et ne pas y aller seul. En attirant un autre entrepreneur dans l’aventure, Jean-Pierre Rosat, Andre va convaincre trois fonds de capital-risque (basés à Lausanne, Bâle et Zurich) d’investir. Mais ce n’est qu’en août 2011 qu’une levée de fonds de 10 millions de francs a pu être réalisée, trois ans après la fondation d’Aleva !

Je ne vais pas m’étendre sur l’activité de la start-up. Aleva développe des électrodes pour la neurochirurgie, qui sont placées dans le cerveau de certains patients atteints de la maladie de Parkinson ou de fortes dépressions. Je ne vais pas non plus vous parler plus avant d’Andre Mercanzini ; il parle beaucoup mieux lui-même de son aventure. Par contre, je note qu’Andre est déjà devenu un « role model » pour les autres entrepreneurs de l’EPFL et qu’il a eu lui-même la chance de faire sa thèse dans un laboratoire très entrepreneurial. Si vous allez sur la page du LMIS4 citée plus haut, vous verrez que pas moins de 13 start-up en sont issues. L’émulation est un élément clé.

Le capital-risque : pour les start-up à croissance rapide

Ce qui m’importe aussi, au-delà des qualités entrepreneuriales des deux fondateurs, est de montrer que le capital-risque n’est pas un objectif inatteignable. Environ 10% des start-up EPFL ont levé de tels fonds. Certains entrepreneurs souhaiteraient faire appel aux acteurs du capital risque et se plaignent de leur conservatisme. D’autres les évitent comme la peste, ils parlent de «vulture capitalists». Le débat est donc ouvert. De plus, ce genre d’investisseurs cherche des sociétés à potentiel de croissance rapide et globale: toutes les start-up ne peuvent donc pas remplir le critère.

Il y a dans le monde, en Europe et en Suisse beaucoup plus d’argent disponible qu’il y a 20 ans, même s’il y en a beaucoup moins que lors de la période d’ «exubérance irrationnelle» de la bulle Internet. Il sera et il a toujours été difficile de trouver de l’argent (pour quelque projet que ce soit d’ailleurs). Pourtant Aleva, mais aussi Biocartis ou TypeSafe (autres start-up EPFL) montrent que la chose est possible. Le capital-risque est il un passage obligé ? J’ai parfois tendance à le penser quand il s’agit de start-up high-tech et je sais que le reproche m’est fait parfois de lui donner trop d’importance. Je note simplement qu’une énorme majorité des grands succès américains ont fait appel à ces fonds, et que les sociétés boot-strapped sont l’exception aux USA. En Europe, c’est l’inverse!

« En Suisse, on préfère le petit gâteau que l’on contrôle complètement »

Je termine en citant Daniel Borel, autre entrepreneur passé par l’EPFL. «La seule réponse que je puisse avancer c’est la différence culturelle entre les Etats-Unis et la Suisse. Lorsque nous avons créé Logitech, en tant qu’entrepreneurs suisses, nous avons dû jouer très tôt la carte de l’internationalisation. La technologie était suisse, mais les Etats-Unis, et plus tard le monde, ont défini notre marché, alors que la production est vite devenue asiatique. Je m’en voudrais de faire un schéma définitif parce que je pense que beaucoup de choses évoluent et que beaucoup de choses bien se font en Suisse. Mais il me semble qu’aux Etats-Unis, les gens sont davantage ouverts. Lorsque vous obtenez les fonds de venture capitalists, automatiquement vous acceptez un actionnaire extérieur qui va vous aider à diriger votre société, et peut-être vous mettre à la porte. En Suisse, cette vision est assez peu acceptée: on préfère un petit gâteau que l’on contrôle complètement qu’un gros gâteau que l’on contrôle seulement à 10%, ce qui peut être un facteur limitatif.»

Il faut viser global tout de suite

Je ne fais pas la une si souvent, ce fut donc intéressant de me retrouver sur la page de l’EPFL ce matin. Tout ego mis à part, je parle de mes obsessions habituelles, du manque de croissance des start-up européennes. Vous pouvez lire l’entretien en cliquant sur l’image plus bas ou la lire à la suite.

Plus sérieuse sans doute, une analyse récente d’Oseo, l’agence française d’innovation, « Dix ans de création d’entreprises innovantes en France ». scrute 5500 start-up fondées entre 1998 et 2007.

On y découvre que 85% des entreprises sont toujours en activité 5 ans après leur création (contre 50% aux USA; j’avais déjà abordé le sujet dans Survie ou échec – quel succès?), elles emploient en général moins de 10 employés et une des explications de ces difficultés est liée au réseaux relationnels. Rien de bien nouveau dans tout cela, si ce n’est peut-être « plus de 50 % des entreprises innovantes se positionnent d’emblée sur les marchés étrangers, et plus de 30 % adressent uniquement des marchés étrangers ».

« Il faut viser global tout de suite »

10.02.12 – Comment se lancer dans la création d’entreprise? Hervé Lebret, spécialiste des start-up et en charge du programme innogrant à l’EPFL, répond à nos questions. « En matière de start-up, il faut viser global tout de suite », estime Hervé Lebret, responsable des Innogrants, outil de soutien aux entrepreneurs académiques. Il estime les suisses et les européens trop frileux en matière de création de jeunes pousses. Chargé de la rédaction d’une chronique mensuelle dédiée aux start-up, dès lundi prochain sur le nouveau site de l’EPFL, il s’est prêté au jeu de l’interview.

Le contexte économique actuel rend-t-il la recherche de fonds plus difficile?
Je vais peut-être vous surprendre mais je trouve que ça n’a pas changé. C’est difficile de trouver de l’argent, comme toujours, mais pas impossible. Cela dépend des domaines, mais je dirais même qu’il y a plus d’argent aujourd’hui qu’il y a quinze ans. Des entreprises comme Scala ou Aleva, issues de l’Ecole, ont levé d’importantes sommes de la part des Capital risqueurs ces dernières années, tout comme Aïmago, Lemoptix ou Attolight qui ont obtenu 1-2 millions de la part de Business Angels.

Y a-t-il des domaines plus porteurs que d’autres ?
C’est plus facile si le savoir-faire est présent localement, comme c’est le cas ici dans le domaine des biomeds ou des nanotechnologies. Les cleantechs commencent à perdre l’engouement qui prévalait jusqu’à dernièrement. Mais je suis convaincu que les idées peuvent sortir de n’importe où et obtenir un bon écho, pour autant qu’elles soient bien relayées. Il ne faut d’ailleurs pas trop se fier aux besoins actuels du marché. Ils ne suffisent pas à prédire quelle start-up va être la prochaine pépite. Les domaines porteurs ont des besoins, mais pas de solution immédiate et lorsque cette dernière arrive sur le marché les premiers ont souvent évolué dans une autre direction.

Comment s’assurer un bon départ avec une start-up ?
Une start-up sur dix parvient à être financée par du capital risque comme Aleva ou Biocartis et atteint la taille de 50 à 100 employés. Puis parmi celles-ci, un dixième aura un gros succès sur dix ans, comme Endoart ou Swissquote qui dépasse les 400 emplois. L’ambition ne devrait pas être la survie. Au contraire, ces jeunes poussent durent parfois trop longtemps. Quelque 90% sont encore là après 5 ans, mais elles n’ont pas grandi. Aux Etats-Unis, il y a davantage de renouvellement : 50% seulement sont encore là passé le même laps de temps. Le problème c’est le conservatisme européen qui n’ose pas la croissance rapide. Je pense qu’il faut rendre les étudiants sensibles à ça très tôt, déjà au gymnase. Etre entrepreneur ne s’improvise pas. Il faut donner aux enfants, aux jeunes, l’envie d’explorer et ne pas stigmatiser l’échec comme c’est encore le cas actuellement en Suisse. Nous allons d’ailleurs projeter bientôt un documentaire passionnant – Something Ventured – au sujet des étudiants curieux de l’entrepreneuriat.

Comment faire sa place ?
Il est relativement facile, avec une bonne idée, de trouver jusqu’à 500’000 frs de fonds publics ou d’associations philantropiques, ce qui permet de survivre un ou deux ans. Ces contacts permettent aussi un marketing gratuit qui peut permettre de trouver de premiers business angels et un premier million. Les limites viennent plus de la trop grande humilité, de l’autolimitation du jeune entrepreneur. Pour réussir, il faut être vendeur et extraverti ou s’allier avec quelqu’un d’autre qui l’est. Le réseau est une aide essentielle pour se positionner.

Quelle est l’importance des start-up dans le tissu économique suisse ?
Il y a environ 40 start-up créées chaque année dans le canton de Vaud, dont 15 dans le domaine académique. Elles jouent un rôle considérable pour l’avenir du canton, de la Suisse et même de l’Europe. Logitech ou Swissquote, par exemple, ont créé beaucoup d’emplois. Cependant, les start-up suisses de manière générale ont de la peine à dépasser les 5 à 6 postes de travail. Le plus grand problème est bien connu : c’est la frilosité des entrepreneurs, qui ont du mal à les faire croître. Ils préfèrent y aller par étape. Aux Etats-Unis, la politique du «tout ou rien» prévaut et amène à un taux de réussite plus important. Facebook, qui annonce son entrée en bourse, en est déjà à 3’000 employés. Les personnes qui ont de bonnes idées foncent et n’ont pas peur de l’échec. Ils visent d’emblée des marchés globaux. La première erreur est de penser en premier lieu au marché suisse, alors qu’il faudrait directement viser le marché mondial. Adopter une vision globale et ne pas avoir peur de paraître arrogant est essentiel.

Auteur: Cécilia Carron – Source: Mediacom

Facebook se dévoile et prépare sa mise en bourse pour $5 milliards

Facebook aura su se faire attendre et désirer. Mais depuis hier, on en sait beaucoup plus sur la start-up qui a annoncé son intention d’aller en bourse. Des chiffres hallucinants. Un scuuès incroyable. Vous trouverez plus bas ma tentative (approximative) de décrire l’actionnariat de la société et les chiffres (chiffre d’affaire, bénéfice, employés) à partir de son document S-1. On pourra comparer l’exercice à celui que j’avais fait en 2010.

Selon mon analyse (et j’ai essayé de différencier les actions existantes et l’actionnariat potentiel qui inclut lui options et « restricted stock »), Zuckerberg possède environ 20% de Facebook, de même que les investisseurs (à travers le preferred stock). Les actions vendues à l’IPO pourraient représenter 5% de l’actionnariat. Vous pouvez aussi découvrir les tours successifs de financement. Le reste appartient aux common stock (employés, mais aussi investisseurs). Enfin difficile d’analyser la dilution des fondateurs tant l’histoire relatée dans le film The Social Network fut complexe. Regarder l’ancienne table.


Cliquer sur l’image pour agrandir la table de capitalisation de Facebook en 2012

Un chiffre d’affaire de $3.7 milliard, un bénéfice de $1 milliard et 3’200 employés en 2011. Une valorisation boursière possible de $100 milliards et une levée $5 milliards lors de l’IPO. Google n’avait pas fait aussi bien! (Google avait $1.4 milliard de revenus, 2’500 employés et avait levé $1.2 milliard lors de l’entrée en bourse. Mais Google n’avait que 6 ans d’age, alors que Facebook est un an plus vieille. En 2005, Google avait $5 milliards de vente, un profit de $1.5 miliard et 6’000 employés!) J’avais déjà fait uen comparaison similaire en 2010: Google contre Facebook? et j’ai mis à jour mes courbes ci-dessous.


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Dans les quatre dernières années, la croissance annuelle de Facebook a été supérieure à 80% pour ses ventes et à 50% pour les emplois. je suis peut-être imprécis en indiquant que la valeur du stcok d’un employé est de $4M, car il y a là aussi des investisseurs. Le tableau qui suit est le calcul que j’ai fait en 2010 et publié dans un post à l’occasion de la sortie du film The Social Network.


Cliquer sur l’image pour agrandir la table de capitalisation de Facebook en 2010

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Nouvelles IPOs (AVG Technologies), stats start-ups mises à jours

J’ai noté 4 nouveaux « filings » d’entrée en bourse (« IPOs ») en un mois, pas mal! Il s’agit d’Audience, Infoblox, Millennial Media et plus important encore pour un citoyen européen comme moi de AVG Technologies. Les velléités d’entrée en bourse de start-up européennes sont suffisamment rares pour mériter l’attention. AVG a des origines tchèques même si elle est de droit hollandais (N. V.) sans doute pour des raisons fiscales. A la suite de ma brève analyse de AVG, je donne une mise à jour de mes données de start-up.

AVG n’est pas la start-up typique. En fait les fondateurs ont vendu leur participation en 2001 à une société d’investissement, soit 10 ans après la fondation de la start-up. les investisseurs ont ensuite développé la société avec une autre équipe en en attirant d’autres investisseurs tels que Intel Capital, TA Associates ainsi qu’un fonds polonais. Peut-être connaissez vous les produits d’AVG, des anti-virus que j’utilise pour mon laptop. J’ignorais qu’il s’agissait d’une start-up européenne…


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La croissance du chiffre d’affaires est impressionante, comme vous pouvez le voir sur la droite de la table de capitalisation, puisqu’elle passe de $100M en 2008 à $150M environ en 2010. J’ai aussi trouvé une présentation datant de 2000 et le fondateur y donne les faits et chiffres sur la période 1996-2000. Il y est question de 17M et 55M de Couronnes tchèques et comme la couronne vaut environ €0.03, cela signifie €0.5-1.5M. Pas mal non plus. Pourquoi les fondateurs ont vendu et ce qu’ils font aujourd’hui? je l’ignore. Ils n’ont pas l’air d’être trop connus dans leur région d’origine à Brno. Tomas Hofer semble travailler pour une autre start-up toutefois. Si quelqu’un a plus d’information, merci de réagir ici ou de me contacter.


Tomas Hofer

Vous pourrez voir les autres tables de capitalisation dans mon document complet. Je n’ai pas grand chose à dire sur elles. Par contre, j’ai mis à jour mes statistiques et j’ai ajouté a mes analyses par région ou par domaine, une analyse par dates, plus précisément relativement aux années de création des start-up.


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La fin d’une aventure de la Silicon Valley

Je viens de lire ce matin un article sur l’ acquisition de Magma par Synopsys pour $507M. Bien souvent, une telle acquisition semblerait être un succès. Je ne suis pas sûr que ça soit le cas ici…

L’EDA est une industrie que j’apprécie car elle décrit parfaitement les dynamiques du monde des start-up. Je ne vias pas entrer dans les détails ici mais vous pouvez lire mes contributions passées sur le sujet. J’ai aussi eu la chance de rencontrer les deux fondateurs et CEO, (tous les deux migrants de la Silicon Valley – SV) Aart de Geus et Rajeev Madhavan, deux légendes de l’EDA, pour ne pas dire de la Silicon Valley. Laissez moi vous donner quelques extraits de mon livre, en date de 2007.

« Le seul succès récent s’appelle Magma Design Automation. Son fondateur, Rajeev Madhavan a étudié dans son pays natal, en Inde, puis au Canada. Il a déjà fondé avec succès deux start-up : LogicVision (vendue à Synopsys) puis Ambit (vendue à Cadence). Il pourrait s’en satisfaire. Magma va être sa nouvelle aventure. »

De plus, il faut ajouter que Andy Bechtolsheim, une autre légende de la SV, fut un business angel dans Magma, avec un montant investi digne d’un VC.

« Il est trop tôt encore pour parler de l’avenir de Magma et de sa capacité à devenir un très grand. Quelques nuages se profilèrent à l’horizon toutefois. Les litiges dans la Silicon Valley ne sont pas monnaie courante. Mais le monde de l’EDA a connu quelques cas célèbres. … Au début de l’année 2005, Synopsys et Magma se retrouvèrent dans une histoire similaire quant au rôle d’un des fondateurs de Magma et quant à l’appartenance de certains brevets. La valorisation de Magma chuta du jour au lendemain et elle ne retrouva sa valeur d’alors qu’avec la résolution du litige en 2007. »

Plus tard le stock souffrit à nouveau comme le montre la courbe ci-dessous.

« Costello se plaint amèrement d’un changement culturel de la région, une plus grande âpreté au gain, trop de litiges. Des start-up ambitieuses nées à la fin des années 90, seule Magma a réussi à passer les premiers obstacles. Il reste encore à Magma à prouver qu’elle peut devenir un grand du domaine. Disparaîtra-t-elle comme Quickturn et Avant! avant elles ou va-t-elle devenir un géant ? Aucune nouvelle société ne semble vraiment capable de menacer les joueurs établis. Dans le monde instable, dynamique, innovant qu’est la Silicon Valley, ce n’est pas une bonne nouvelle. »

Il ne reste que trois grands acteurs de l’EDA, Synopsys, Cadence et Mentor. Aucune start-up ne semble capable de menacer le statu-quo et le marché n’est plus vraiment en croissance. Ceci n’est en effet pas une bonne nouvelle.

PS: Juste pour mémoire et parce que je fais aussi l’exercice régulièrement, voici les données de Magama lors de son IPO. Notez que sa valorisation n’est pas très différente de l’offre d’achat en 2011…

Qu’est-ce qu’une start-up?

Pourquoi poser la question 4 ans après avoir écrit mon livre? La réponse n’est-elle pas évidente? A croire que non quand je vois combien de fois je dois clarifier le concept et dire la différence entre n’importe quelle entreprise et celui de start-up ou même de jeune pousse, l’équivalent francophone. Est-ce que toute entreprise récemment créée n’est pas une start-up? Pas vraiment. Mon collègue Pascal (merci 🙂 ) vient de me signaler un nouvel article de Steve Blank, Why Governments Don’t Get Startups, qui donne une excellente définition du mot:

« Alors que les grandes entreprise on un modèle d’affaires bien identifié, les start-up sont des entités temporaires destinées à la recherche d’un modèle extensible et reproductible. »

Dans mon livre, je les avais définies ainsi : « Une start-up est une entreprise qui est née d’une idée et a le potentiel pour devenir une grande entreprise » et j’avais aussi ajouté « Apple, Cisco, Google, Intel, Microsoft, Oracle, Yahoo, YouTube. Vous connaissez certainement ces noms. Ces sociétés n’existaient pas il y a quarante ans. Ils sont des géants de la technologie d’aujourd’hui. »

Pourquoi j’apprécie la définition de Blank? Pour son emploi de « temporaire » et aussi de « à la recherche d’un modèle ». Apple, Cisco, Google, Intel, Microsoft, Oracle, Yahoo, YouTube ont clairement été dans le monde des start-up; et je n’avais pas mentionné cette idée d’un modèle d’affaires qui ne préexistait pas la création de la start-up.

Et Blank d’ajouter:

Ces start-up ont besoin de capital-risque pour financer leur recherche d’un modèle d’affaires, et elles attirent des investissements de financiers assez fous – les capital-risqueurs. Elles embauchent les meilleurs talents, les plus brillants. Leur travail consiste à rechercher un modèle d’affaires reproductible et extensible. Quand elles l’ont trouvé, leur focalisation sur l’échelle nécessite encore plus de capital risque pour permettre leur développement rapide.

C’est le modèle typique de la Silicon Valley, de croissance rapide et en général non organique. Les gazelles ont souvent une croissance de leurs revenus annuels d’au moins 50%, pour ne pas dire 100%. Regardez à nouveau les taux de la croissance des Gazelles et Gorilles dans mon post sur le sujet ou la croissance des revenus ci-dessous (Tableau 8-8 du livre).

Je vois au moins deux raisons de débat :
– En Europe, la croissance est souvent plus lente, en tout cas inférieure à 100% ! Une croissance lente est-elle compatible avec la définition de start-up ?
– Blank voit deux phases de financement VC, la première pour rechercher et valider le modèle d’affaires, la seconde pour permettre l’expansion rapide. Pourtant Oracle et Microsoft n’ont jamais eu besoind e financement externe pour le financement de leur croissance, qui aura été de plus de 100% durant leurs dix premières années!

10 leçons de l’histoire de Dropbox

Forbes veint de publier l’histoire de Dropbox: Dropbox: The Inside Story Of Tech’s Hottest Startup. Ou s’agit-il déjà de la légende? (Je dois remercier mon collègue Mehdi qui m’a mentionné le lien, 🙂 )

Cela ressemble à tant d’histoires connues de la Silicon Valley que cela pourrait devenir lassant. Peut-être faut-il prendre tout cela avec quelques pincettes… quoi qu’il en soit, l’article ci-dessus mérite la lecture et voici les 10 leçons que j’en retiens:

1- UN JEUNE GEEK – Drew Houston, « typique » Americain fondateur de start-up, a commencé à jouer avec les ordinateurs à l’âge de 5 ans. A 14 ans, il travaille déjà pour des start-up. Steve Jobs l’avait repéré pour avoir désossé (« reverse-engineeré ») le système de fichiers d’Apple. Il a 24 ans quand il crée Dropbox.
2- UN ROLE MODEL – « Personne ne nait CEO, mais on ne vous le dit pas » est ce que Houston a appris mais quand il vit un des ses amis lancer sa start-up, il pensa « S’il pouvait le faire, je savis que je le pouvais aussi. ».
3- UN COFONDATEURPaul Graham le sélectionna en 2007 dans son programme Y Combinator tout en insistant pour qu’il se trouve un co-fondateur. Il s’agira d’un dropout du MIT, Arash Ferdowsi.
4- UN ANGE BIENVEILLANT – Quelques mois plus tard, ils reçoivent le soutien de Pejman Nozad (célèbre avec Saeed Amidi pour leur business de tapis d’Orient transformé en bureaux pour start-up [Logitech, Google] puis en fonds d’investissement [PayPal]).
5- UN CAPITAL-RISQUEUR – Rapidement, Nozad les présente à Michael Moritz (l’investisseur légendaire de Sequoia [Yahoo et Google]) qui parie $1.2M sur dropbox.
6 – DES MIGRANTS – Ferdowsi et Nozad des origines en Iran. Ils parlèrent en persan lors de leur première rencontre.
7- TALENT & PASSION – « Je pariais qu’ils auraient l’intellect et l’énergie pour être meilleurs que tous les autres » affirme Moritz. « Houston et Ferdowsi changèrent de bureau et dormaient souvent sur leur lieu de travail. »
8- FRUGALITE & RAPIDITE – Ycombinator finança Dropbox en juin 2007, Sequoia en septembre 2007, suivi l’année suivante par $6M d’Accel et Sequoia. 9 employés en 2008 (pour 200’000 utilisateurs) et 14 personnes in 2010 pour 2Mio d’utilisateurs.
9- DES CLIENTS – En 2011, Dropbox devrait atteindre les $240M de chiffre d’affaires, provenant de seulement 4% des sa base de 50Mio d’utilisateurs. 70 employés et bénéficiaire.
10- DES RESSOURCES – Être profitable n’a pas empêché Dropbox de lever $250M avec Index, Greylock, Benchmark et les investisseurs déjà présents. A une valorisation de $4B.

Encore une start-up française cotée en bourse!

Elles ne sont pas nombreuses, mais voici la troisième entrée en bourse d’une start-up française en 2011, après Sequans et Envivio. Alors que ces deux dernières ont fait leur IPO au Nasdaq et au NYSE, Mauna Kea Technologies est allé sur Euronext à Paris en août. Je ne connaissais pas MKT mais je viens de travailler sur leur prospectus d’entrée ne bourse.

Une jolie histoire entrepreneuriale. Deux fondateurs, amis semble-t-il depuis le collège, fondent MKT en mai 2000. Benjamin Abrat (MBA, quelques années chez Givaudan) et Sacha Loiseau (Ecole Polytechnique, docteur et astrophysique et postdoc à Caltech) forment le couple typique de jeunes entrepreneurs sans grande expérience professionnelle, mais on peut imaginer ayant confiance l’un en l’autre.

Moins habituelle, en France du moins, est l’histoire de son financement:
– un amorçage de €1.6M avec business angels français de renom: Marc Vasseur (Genset), Jérôme Chailloux (Ilog), Jean-Luc Nahon (Isdnet), Christophe Bach (Isdnet), Patrice Giami (Isdnet), Philippe Maes (Gemplus) et Daniel Legal (Gemplus)
– un premier tour de €5M en 2004,
– un second tour de €20M en 2007,
suivi d’une levée de €50M lors de l’IPO cet été. Voici donc mon tableau habituel décrivant actionnariat et financement.


(cliquer sur l’image pour l’agrandir)

Dans une autre interview, Sacha Loiseau décrit ce qu’il manque aux doctorants français:
« Que pensez-vous de leur formation ?
S. L. : Elle leur apporte autonomie et esprit d’initiative, deux qualités importantes pour la recherche fondamentale ou appliquée. Néanmoins, la formation doctorale française ne couvre pas certaines notions pourtant essentielles au monde de l’entreprise : le client, le travail en équipe, la veille technologique, la propriété industrielle, le transfert de technologie, la maîtrise de l’anglais pour n’en citer que quelques-unes. Le point fort de cette formation est que, confrontés à des problèmes ardus, les thésards apprennent à se débrouiller seuls pour trouver une solution. C’est une habitude très positive pour une entreprise qui doit innover en permanence, mais ça ne favorise pas toujours le travail en équipe, l’ouverture sur le monde… Beaucoup de thésards sont, me semble-t-il, très isolés et ne savent pas ce que font leurs concurrents. »

L’âge des fondateurs

Comme je l’ai indiqué dans mon récent post (en anglais seulement) sur Carbonite, j’ai promis de revenir sur le sujet de l’âge des fondateurs après des commentaires de Pascale sur un autre de mes posts en anglais,
Is There A Peak Age for Entrepreneurship?

Or j’ai des données que je n’avais pas exploitées jusqu’ici, avec lesquelles je vous ennuie peut-être quand je publie mes tables de capitalisation de start-up qui vont en bourse. Ces sociétés publient l’âge de leurs dirigeants si bien que si les fondateurs sont encore présents lors de l’IPO, je peux en déduire leur âge à la fondation. De plus les biographies donnent aussi les start-up précédemment créées par ces entrepreneurs. J’ai donc fait un rapide exercice hier que j’ai classé en 2 groupes. Le premier regroupe essentiellement des IPOs assez récentes 8depuiws 5 à 10 ans) et le second, des start-up des années 90 ou même avant. Notez que dans mon livre, j’arrivais à une moyenne de 27 ans pour les start-up célébrissimes.

Voici donc le 1er groupe (52 fondateurs issus de 25 start-up):

Et voici le groupe des sociétés plus anciennes (53 fondateurs issus de 22 start-up) avec non seulement la moyenne du groupe mais aussi des deux groupes en fin de tableau.

Ce ne sont pas des statistiques mais des anecdotes et notez de plus que si je n’avais pas l’âge, j’ai aussi regardé le parcours académique avec l’hypothèse que l’on obtient son BS à 21 ans environ. La moyenne est à 34, et surtout augmente de 31 à 35. Clairement pas les 27 ans de mes stars, mais pas non plus les 40 ans des études récentes. je vous laisse décider si le verre est à moitié vide ou à moitié plein. Je reste intrigué par le fait que les « stars » semblent être beaucoup plus jeunes (en admettant que cette nouvelle hypothèse soit correcte!).

Un dernier commentaire qui n’est pas lié au sujet: le « nombre d’années de la création à l’entrée en bourse (IPO) » passe de 3.7 à 6.8, avec une moyenne à 5. Les chiffres restent bien inférieurs à mes mesures anecdotiques en Europe (de l’ordre de 9, voire 10 ans).

Quand Wavecom surfait

Wavecom fut une des stars des start-up françaises et même européennes. Ma lecture de vieux articles du Red Herring m’a rappelé cette belle mais trop brève histoire.

J’en traduis un passage: « Lorsque Wavecom a été fondée en 1993, l’entreprise occupait seulement quelques pièces dans un immeuble de Paris. Maintenant il a repris l’ensemble du bâtiment et emploie plus de 200 personnes y compris à San Diego et à Hong Kong. En Juin la société est devenue publique sur le Nasdaq (WVCM) et sur la Nouveau Marché français (CAC). Elle fournit WISMOs aux développeurs de téléphones mobiles comme Mitsubishi et Philips, et pour l’automobile la technologie de système de positionnement mondial (GPS) développée par Celestica en Grande-Bretagne. On les trouve aussi dans les terminaux de boucle locale sans-fil de Siemens, et dans les dispositifs de données sans fil de Vodafone. Son taux de croissance annuelle depuis sa fondation en 1993 a été de 68 pour cent. Ses revenus en 1998 de 22 millions de dollars ont déjà été dépassés dans le première moitié de 1999, à 23 millions de dollars-un bond de 9,5 millions de dollars par rapport à la même période un an plus tôt. Contrairement à la plupart des sociétés high-tech américaines, Wavecom jamais dépendu de capital-risque. Au lieu de cela, elle a été rentable dès le début et a connu une croissance organique. Cette croissance par auto-financement de l’entreprise et sa rentabilité initiale sont typiques des sociétés européennes car le capital-risque, traditionnellement, a été difficile à obtenir. »

Wavecom fut en effet fondée par Michel Alard, Aram Hékimian et André Jolivet avec l’aide de Marc Fourrier comme business angel. Fourrier fut aussi un investisseur dans Ilog. La table qui suit donne l’actionnariat de Wavecom lors de son IPO. Il semble y avoir de petites inexactitudes dans l’article du RH:
– il y eut un peu de capital-risque juste avant l’IPO,
– la société fut peut-être profitable dans ses premières années mais pas sur la période 1998-2000.

Mais la vraie mesure du succès initial de Wavecom se lit sur le tableau suivant lorsque Wavecom fit son secondaire. Il faut savoir que l’IPO est un événement important, mais le secondaire qui est moins connu l’est tout autant pour les actionnaires. C’est en général à ce moment que la liquidité devient possible…

Qu’est devenue Wavecom? Les revenus et profits ont suivi une courbe classique. En 2009, Wavecom a été rachetée par Sierra Wireless pour €218M après avoir refusé une offre de Gemalto à €110M.